[Vidéos]: Changement de cadre
Cela fait cinq ans que le Musée national d'histoire et d'art était partiellement fermé suite à une grosse secousse dans le quartier qui avait endommagé les maisons Wiltheim. Pour sa réouverture ce week-end, il nous réserve quelques surprises. Et notamment la place offerte à l'art contemporain luxembourgeois.
Un nouvel agencement des salles. © PHOTO: Tom Lucas
Par Marie-Laure Rolland
Les projecteurs sont braqués durant tout le week-end sur le Fëschmaart. Le Musée national d'histoire et d'art (MNHA) dévoile enfin au public ses nouveaux espaces d'exposition. Grâce aux travaux de rénovation qui s'achèvent dans les anciennes maisons Wiltheim, le musée gagne près de 2.000 mètres carrés de surface utile.
Mais plus généralement, c'est toute la conception du musée qui a été repensée pour rendre celui-ci plus accessible au public. Signe de cette ouverture: l'accès à l'exposition permanente est désormais gratuit. Une première au Luxembourg.
Réactions positives des premiers visiteurs
Cela fait plus de cinq ans que les trois maisons Wiltheim – qui font face au bâtiment central du musée et abritent l'exposition sur les Arts décoratifs et populaires – étaient fermées. Une décision prise après la grosse secousse qui a ébranlé le quartier à l'époque et menacé la structure de ces maisons patriciennes datant des XVIe et XVIIe siècles. Des experts en bâtiment ont été mandatés. Leur verdict: une rénovation en profondeur était souhaitable. Du coup, l'idée a été lancée du côté de la direction du MNHA de ne pas se contenter de consolider la structure et de reboucher les plâtres. C'est tout le parcours muséographique qui a été repensé.
Le Luxembourg pour les nuls
Passé le hall d'accueil du MNHA, le visiteur emprunte une passerelle qui le conduit vers le niveau 1 du bâtiment central. Il peut découvrir là un «prologue» qui offre quelques informations clés sur deux sujets: l'histoire du pays et celle du musée depuis l'indépendance de 1839.
Le directeur du MNHA Pol Polfer: un chantier de longue haleine
Nouveauté: l'affichage est désormais en trois langues (français, allemand, anglais). Comme l'explique le directeur du musée, Michel Polfer, «nous constatons que beaucoup d'étrangers viennent ici avec de fausses idées stéréotypées. Par exemple, ils pensent que la richesse du musée est en adéquation avec le PIB/habitant, ou encore que la monarchie luxembourgeoise est l'une des plus anciennes d'Europe. Ils s'attendent donc à des collections somptueuses. Le prologue permet d'expliquer brièvement l'histoire du pays, de 1839 à nos jours, et parallèlement celle de nos collections». Inutile de dire que le public autochtone pourra tout aussi utilement se rafraîchir la mémoire.
Une carte interactive est prévue pour stimuler les curieux. Quelques objets emblématiques sont exposés. Une time-line fait défiler les dates à retenir sur le sol.
Jeu de piste
A l'issue de ce bref parcours, le visiteur se retrouve à un carrefour à partir duquel il va pouvoir s'orienter. Une nouvelle signalétique offre un guidage en couleurs et en lettres: de A pour Archéologie (en rouge) à E pour Exposition temporaire (en brun). Curieusement, les Beaux-Arts ont hérité de la lettre D (en vert) tandis que le Cabinet des médailles s'affiche sous la lettre B (en jaune) et les Arts décoratifs et populaires sous la lettre C (en bleu). A chacun ensuite de s'élancer à sa guise en suivant les lignes colorées.
A la découverte des nouveaux lieux
Bonne nouvelle pour les personnes en fauteuil roulant: tous les espaces sont en principe accessibles aux handicapés, à l'exception de l'une ou l'autre salle dans l'Aile Wiltheim. «Il a fallu faire des arbitrages entre normes techniques, coût et préservation de l'authenticité du bâti», explique le conservateur de la section des Arts décoratifs, Régis Moes.
Entre galeries et passerelles
La particularité du parcours est de débuter dans le bâtiment central, de se poursuivre dans l'Aile Wiltheim en passant par une première galerie qui surplombe la rue Wiltheim, puis de revenir dans le bâtiment central par une deuxième passerelle qui vient d'être construite (voir le plan ci-dessous).
Compte tenu de la configuration des maisons Wiltheim (une succession de petites pièces) et des différences de niveau qui existent entre elles, un bon sens de l'orientation est requis pour ne pas se perdre dans ce qui fait un peu figure de labyrinthe pour le néophyte. D'autant que le fil d'Ariane coloré manque encore à certains carrefours. «Les circuits seront probablement améliorés au fil du temps», concède Régis Moes.
Visites guidées gratuites
Pas de souci pour le public lors des journées d'inauguration: des visites guidées gratuites sont prévues par petits groupes toutes les heures. Une bonne occasion de se familiariser avec les lieux. Du côté du bâtiment central, les repères sont plus simples à trouver. C'est au quatrième étage que l'on peut découvrir le nouvel accrochage dédié à l'Art moderne autour du concept de la figuration et de la non-figuration.
Cette réouverture intervient après celle du troisième étage dédié à l'Art ancien (en mai 2014) et avant celle de l'étage qui sera consacré à l'Art contemporain (prévue pour 2016). Nouvel accrochage Les collections du musée étant ce qu'elles étaient et ce qu'elles restent, le visiteur familier des lieux ne doit pas s'attendre à une révolution. Néanmoins, les nouveaux circuits ainsi que le nouvel accrochage changent singulièrement la donne.
Du côté des Beaux-Arts, il faut noter que pour la première fois on peut voir le tableau d'un peintre luxembourgeois dans la salle dédiée à l'art moderne. Il s'agit de l'oeuvre néo-impressionniste de Dominique Lang intitulée «Le barrage».
Valoriser la création nationale
Par ailleurs, l'effort est notable pour valoriser la création nationale. Le visiteur peut désormais, en traversant quelques salles, voir un bref panorama représentatif de ce qui s'est fait dans le pays depuis l'indépendance, tant au niveau de la peinture que de la sculpture.
Pol Polfer: pas de conflits d'intérêts avec le Mudam
L'entrée en force des artistes contemporains – dont certains sont également collectionnés par le Mudam, comme Michel Majerus – ne passe pas inaperçue. On s'arrêtera aussi sur la salle désormais exclusivement dédiée à l'artiste «luxembourgeois» le plus célèbre, Edward Steichen.
Cet espace fait l'objet de toutes les attentions. Il s'allume uniquement à l'arrivée du visiteur afin de ne pas trop exposer les photos à la lumière. En outre, seuls 20 clichés (sur les 178 que possède le musée depuis le legs de la famille en 1985) seront exposés par roulement tous les trois mois. On peut actuellement découvrir un tirage posthume – mais autorisé – de «The Pond – Moonrise», photographie qui avait pulvérisé les records pour une photographie lors d'une vente aux enchères à New York en 2006, affichant 2,9 millions de dollars.
Toujours du côté des Beaux-Arts, le visiteur peut découvrir dans l'Aile Wiltheim une exposition temporaire consacrée à une commande faite par le musée au photographe Eric Chenal. Celui-ci a suivi le chantier de rénovation de l'Aile Wiltheim et en propose un aperçu extrêmement intimiste et subjectif, plus que documentaire. Ses clichés en petit format s'arrêtent sur des détails qui, hors contexte, ouvrent l'imaginaire du spectateur sur toutes sortes d'histoires.
«De Mansfeld au design (1500-2014)»
C'est ensuite du côté des Arts décoratifs que l'on observe une évolution substantielle. La nouvelle exposition permanente, conçue par l'ancien conservateur Jean-Luc Mousset, s'intitule «De Mansfeld au design (1500-2014)». Alors que l'ancienne exposition s'intéressait surtout à l'aspect folklorique des arts décoratifs, cette section invite désormais à découvrir l'évolution des styles de vie au Luxembourg depuis la Renaissance. Quelque 200 objets sont exposés.
Au fil des salles, on s'arrêtera devant les enseignes des corporations, de la verrerie ou des faïences datant de l'époque des maisons Wiltheim, la fameuse voiture de Paul Wurth, une superbe horloge astronomique datant du début du siècle passé, de beaux vitraux art nouveau, mais aussi des pièces plus récentes comme le salon des époux Pauly-Graf datant des années 60 ou la cuisine modulable imaginée en 2006.
Un panorama qui dévoile un certain mode de vie bourgeois et sans ostentation. On est curieux de voir la manière dont sera documenté le XXIe siècle!
Le programme du week-end d'inauguration
Journées «Portes ouvertes» les 21 et 22 mars.
Samedi 21 mars: ouvert de 10 à 20 heures. Visites guidées, atelier de peinture sur céramique pour les enfants (11-17 heures), face-painting. A 18 heures concert de Serge Tonnar & Legotrip sous le chapiteau.
Dimanche 22 mars: ouvert de 10 à 18 heures. Visites guidées, atelier pour enfants «Piments et condiments» (de 11 à 17 heures), face-painting, spectacle de danse Vortex (11 heures), concert musique baroque (15 et 17 heures) et du Marly Marques Quintet (16 heures).