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Consommation

La difficile transition belge vers l’e-commerce

Face aux syndicats, le gouvernement De Croo veut revoir le coût du travail de nuit réputé néfaste au commerce en ligne.

Sur les six premiers mois de l'année, les consommateurs belges ont déjà dépensé en ligne plus de 5,56 milliards d'euros.

Sur les six premiers mois de l'année, les consommateurs belges ont déjà dépensé en ligne plus de 5,56 milliards d'euros.

Max Helleff

De notre correspondant Max HELLEFF (Bruxelles) - Le récent accord budgétaire obtenu au sein de la coalition Vivaldi du Premier ministre Alexander De Croo a ouvert parallèlement de nouvelles pistes censées régénérer l’économie belge. Parmi celles-ci, l’engagement gouvernemental de prendre les mesures nécessaires pour faciliter le travail de nuit dans le commerce électronique. L’objectif est d'abord de réactiver une disposition prise dans le passé et qui encourageait l’introduction d’une activité nocturne dans une entreprise pourvu qu'un syndicat soit d’accord.

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La mesure vise également à accorder aux personnes qui, individuellement, veulent travailler de nuit la possibilité de le faire. Ces changements paraissent toutefois légers au vu de l’énorme marché qui est à prendre…

En Belgique comme ailleurs, la crise sanitaire a provoqué une augmentation très nette du commerce en ligne. Plus rapide, plus facile, mais aussi plus «safe» face au covid. Selon Comeos, la Fédération du commerce et des services, 1,3 million de Belges sont ainsi devenus de nouveaux consommateurs sur le web depuis 2020.

Au total, les Belges ont même dépensé 5,56 milliards d'euros dans l'e-commerce au cours de la première moitié de l'année. Un chiffre à comparer avec les 5,1 milliards d'achats sur la même période 2020. Et les professionnels du secteur estiment que cette tendance est durablement ancrée. Mais le problème est que la Belgique, nantie d'une législation du travail inadaptée ou protectrice selon les points de vue, traîne la patte.

Création d'emplois

Selon Dominique Michel, le patron de Comeos, la meilleure part du gâteau revient aux grandes plateformes étrangères – dont bien sûr Amazon. Les inciter à s’installer durablement sur le territoire belge pourrait aboutir à la création d’un nombre important d’emplois. Or, pour l’instant, cette fois selon le vice-Premier ministre Vincent Van Quickenborne, huit nouveaux postes sur dix atterrissent aux Pays-Bas. «On rate des emplois, affirme le libéral flamand. Selon le secteur de l’e-commerce, 22.500 jobs supplémentaires pourraient être créés d’ici 2025 (contre 7.395 entre 2015 et 2020).»

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Ces nouveaux postes pourraient compenser – mais à quelle hauteur ? – les pertes d’emplois aujourd'hui enregistrées dans les magasins physiques. Si la Wallonie s’en sort ici plutôt bien, le centre de Bruxelles a énormément souffert. L’agence Hub.Brussels note qu’en raison de la chute vertigineuse du tourisme international « la fréquentation piétonne n’a jamais été aussi mauvaise. En pleine crise, il ne restait que 20% de visiteurs, avant une remontée à 50 puis à 60%. Les commerçants de l’hypercentre tirent la langue.

Cinq mois pour trancher

Mais pour doper le commerce électronique, il faut revoir la législation sur le travail de nuit, moment où l'empaquetage des achats est opéré. Problème : le travail de nuit démarre à 20h en Belgique. Au-delà, les travailleurs perçoivent des primes pour horaire décalé ou pénibilité. D'où un surcoût qui rend l’e-commerce trop cher et pousse les grandes plateformes étrangères à s’établir dans les pays limitrophes.

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Les négociations entre le secteur et les syndicats ont toujours achoppé sur ce point. Comeos désespère de les convaincre un jour. Côté gouvernemental, le PS se montre réticent, mais il n’est pas impossible que des évolutions soient actées au terme d’un de ces trocs dont la politique belge a le secret. Le gouvernement De Croo - dont les socialistes font partie - propose notamment de faciliter l'introduction du travail de 20h à minuit, avec une baisse globale du coût à la clé pour les entreprises, puisque le calcul des primes serait revu. Il donne jusqu'au 1er mars 2022 aux partenaires sociaux pour aboutir. Après, il tranchera lui-même si besoin.

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