La Société Générale Bank and Trust Luxembourg dans l’œil du cyclone
En 2012, la Société Générale assurait ne plus avoir d'activité dans les paradis fiscaux. Les informations diffusées ce mardi par le journal Le Monde et l'émission Cash Investigation contredisent en partie cette déclaration. Les «Panama papers» montrent que la banque française a créé des centaines de sociétés-écrans, dont les deux tiers via sa filiale luxembourgeoise.
L'entité luxembourgeoise SGBT Luxembourg ne communique plus directement. Elle renvoie les journalistes à la direction parisienne du groupe pour toute question relative aux «Panama papers». © PHOTO: Chris Karaba
Par Linda Cortey
Avec 979 sociétés-écrans créées depuis 1977, dont les deux tiers via Société Générale Bank and Trust Luxembourg, la Société Générale fait partie des banques les plus actives chez Mossack Fonseca. Or, son directeur général Frédéric Oudéa avait annoncé en 2012 que son groupe n'avait plus d'activité dans les paradis fiscaux et autres centres financiers offshore. Une déclaration que la Société Générale avait réitéré lundi, lors des premières révélations du scandale des «Panama papers».
Alors ce mardi, Le Monde et l'émission Cash Investigation sont allés plus loin dans les informations concernant la Société Générale. Ils ont souligné que si la banque avait fortement réduit son activité depuis 2012, il restait toujours des sociétés-écrans gérées par le groupe français. 36 sont encore effectivement actives. La banque a donc précisé ses déclarations, assurant que ces quelques entités agissaient de manière tout à fait transparente. Il n'en reste pas moins que la Société Générale reste bel et bien encore active au Panama.
Le but était bien de cacher l'identité des bénéficiaires
L'entité luxembourgeoise du groupe, SGBT Luxembourg se situe au coeur du système des sociétés-écrans, selon le documentaire de Cash Investigation diffusé hier soir. Entre 2000 et 2015, elle en a créé 460. Et ces entités ont bien été utilisées dans le but de cacher l'identité des réels bénéficiaires. C'est ce que montre un échange de mails entre Mossack Fonseca et la Société Générale.
Cette dernière indique au cabinet d'avocats panaméen qu'elle ne donnera en aucun cas les passeports de ses clients, afin de protéger leur identité. «On est au cœur de quelque chose de très profond, très grave. Avoir eu un rôle actif pour le compte de ses clients, c’est gravissime, c’est inacceptable», déplore le rapporteur de commissions d'enquête au Sénat sur l'évasion fiscale et ses acteurs interrogé dans le documentaire.
Toujours pour assurer la discrétion de ses clients, la Société Générale a demandé en 2008 à Mossack Fonseca de créer deux fondations «qui agiront comme actionnaire des structures dans les Îles Vierges Britanniques de nos clients. Nous devons être surs que ces fondations seront contrôlées par nous, qui agirons sur instruction de nos clients», indique la banque dans un mail.
SGBT Luxembourg se refuse à tout commentaire
La banque SGBT Luxembourg revient régulièrement dans ces démarches actives de la banque au Panama. La banque ne veut pas commenter les informations parues et renvoie vers Paris pour plus d'informations. A Paris, le groupe s'est contenté de mettre à jour son communiqué de la veille.
Une réponse qui ne devrait pas suffire à apaiser le cyclone au-dessus de la Société Générale. Hier, le gouvernement français a annoncé avoir convoqué les dirigeants des banques françaises impliquées dans les «Panama papers» et entend réinscrire le Panama sur sa liste des paradis fiscaux.
Plus largement, les révélations faites hier montrent, que ce sont au total 365 banques dans le monde qui ont fait appel aux services du cabinet panaméen.
Ainsi, sur les 214.488 sociétés offshore immatriculées par Mossack Fonseca, 15.579 l'ont été par des établissements bancaires pour leurs clients. Outre Société Générale, UBS, Crédit Suisse et HSBC, sont aussi citées l'allemande Deutsche Bank et la scandinave Nordea.