Le Sud en pleine recomposition
De Dudelange à Differdange, et d'Ehlerange à Esch-sur-Alzette, neuf friches industrielles retrouvent actuellement une nouvelle vie, après une lente désintégration.
Le Crassier Terres Rouges, à la frontière française entre Esch-sur-Alzette et Audun-le-Tiche. © PHOTO: Pierre Matgé
Success story durant des décennies, l'aventure sidérurgique dans le sud du pays a connu un déclin continu dont l'origine remonte probablement au début des années 1980. Au point qu’à l’époque, les responsables de la ville de Differdange - réunis autour du maire récemment décédé Nic Eickmann – avaient fait part de leur crainte de voir leur cité devenir «ville morte». En dépit de ce pessimisme, et après des années économiques difficiles, le vent a tourné. Livrés à eux-mêmes durant des années, les sites et les infrastructures industriels font désormais l’objet de projets urbains modernes.
Esch s'ouvre
C’est le cas de la ville d'Esch-sur-Alzette et de Schifflange sa localité voisine, de la Lentille Terres Rouges et, à plus long terme, du Crassier Terres Rouges. Sans oublier Belval, une ville entourée de trois usines, un corset dont elle peut enfin sortir. Au total neuf sites promis à une renaissance.
Changements chez ArcelorMittal
Le développement de nombreuses friches industrielles a longtemps été lié au bon vouloir du propriétaire historique d’alors, ArcelorMittal, dont la décision relativement récente de vendre ses anciens sites industriels a changé la donne. Ainsi en 2016, le ministre du Logement de l'époque, Marc Hansen, et le ministre de l'Intérieur, Dan Kersch, avaient pu annoncer le rachat par l'État de six terrains en jachère au géant de l'acier, incluant les sites de Neischmelz (Dudelange) ou d’Ecosider (Pétange). La même année, le déclassement officiel de l'aciérie de Schifflange était officialisé, tandis que la Lentille Terres Rouges d’Esch-sur-Alzette était vendue à un investisseur privé.
Belval, la nouvelle «locomotive»
Bien que de nombreux sites sidérurgiques en jachère soient désormais disponibles, le Luxembourg manque encore d'expérience en matière de revitalisation. Par conséquent, tous les yeux sont tournés vers Belval et Agora, la société en charge de son développement urbain. Ce n’est pas un hasard si Lydia Mutsch, alors bourgmestre d’Esch-sur-Alzette a toujours parlé de l’université, entre-temps achevée et désormais opérationnelle, comme d’une «nouvelle locomotive» pour le sud. «À l'époque, nous devions créer un site occupant 20.000 à 25.000 emplois et hébergeant seulement 7.000 habitants», a rappelé Vincent Delwiche le directeur général d’Agora. Il a également souligné que Belval avait été planifié par des personnes «qui n'y vivaient pas».
Aujourd'hui, les objectifs diffèrent: le Sud a urgemment besoin de nouveaux acteurs économiques, à l’exemple du Creative Hub 1535. Mais l'espace de vie reste quant à lui au moins aussi important. Pour cette raison, le gouvernement a donc instauré un quota minimum de 50% de logements sur le site d’Esch-sur-Alzette/Schifflange. Claude Turmes (Déi Gréng), ministre de l'Aménagement du territoire, avait dans cette optique indiqué vouloir «renforcer la création d'emplois dans cette partie du pays». Et ce, afin de ne pas la transformer «en cité dortoir de la capitale».
Quartier écologique
La composante écologique joue également un rôle majeur dans les projets de développement. À Esch/Schifflange et Neischmelz par exemple, l’énergie géothermique est considérée comme une source d’énergie possible. Claude Turmes a même parlé d'une sorte de label «quartier écologique made in Luxembourg» pour la friche industrielle. Bien qu'ArcelorMittal produise toujours de l’acier à Belval, Differdange et Rodange, la richesse du Sud n'est plus faite de ce métal. Elle réside maintenant dans le potentiel de recomposition de ses anciens sites sidérurgiques.
Texte: Nicolas Anen. Traduction et adaptation: Marc Auxenfants