Virgule
En projet au Luxembourg

L'exemple belge des bodycams: «c'est une réussite pour nous»

Si les avis sur ces caméras embarquées sont partagés au Luxembourg, en Belgique, de nombreuses zones de police ont déjà adopté ce dispositif depuis près d'un an. Celles-ci se montrent d'ailleurs plus que satisfaites.

En Belgique, la plupart des policiers de la province de Luxembourg utilisent déjà ce dispositif depuis plusieurs mois.

En Belgique, la plupart des policiers de la province de Luxembourg utilisent déjà ce dispositif depuis plusieurs mois. © PHOTO: AFP

Journaliste

Il y a quelques jours, on apprenait que la police luxembourgeoise allait enfin être équipée de bodycams. Dans un premier temps, 1.682 policiers seront équipés de ces caméras et six millions d'euros sont prévus à cet effet pour les cinq prochaines années. Le texte de loi, accompagnant le déploiement de ces caméras embarquées, restreindra l'utilisation des bodycams en dehors de l'espace public.

Lire aussi :Les bodycams protègent-elles uniquement les policiers?

Ainsi, un agent de police devrait uniquement procéder à l'enregistrement d'images avec sa bodycam dans les situations suivantes: si quelqu'un l'appelle à l'aide, dans les cas de violence domestique et dans le cadre de crimes et délits flagrants ou en présence d'indices qui laissent présumer qu'un crime ou délit est sur le point d'être commis. Seulement voilà, des voix s'élèvent contre ce projet. La commission des droits de l'homme a notamment pris position de manière critique, reprochant une législation opaque et pas assez explicite. Celle-ci exhorte notamment les législateurs à trouver un équilibre entre la protection du policier et celle du citoyen.

La province de Luxembourg à l'avant-garde du projet

Bref, les avis sur la question sont donc partagés. Pourtant, de l'autre côté de la frontière luxembourgeoise, en Belgique, la plupart des policiers de la province de Luxembourg utilisent déjà ce dispositif depuis plusieurs mois. La zone de police de Famenne-Ardenne, qui couvre l'ensemble du nord de la province (Marche-en-Famenne, Vielsalm, Gouvy, Nassogne, Houffalize, etc.), fait partie de ces zones à l'avant-garde en matière de bodycams, à l'instar des zones Semois & Lesse (Bertrix, Bouillon, etc.) ou encore Centre-Ardenne (Bastogne, Libramont, etc.).

«Le projet a été lancé en 2021 pour une mise en œuvre effective au début du mois de mai 2022 après une formation des membres du personnel», rappelle Daniel Sommelette, chef de corps de la zone de police Famenne-Ardenne.

Au total, une trentaine de caméras équipent depuis lors les forces de l'ordre de la zone lors de leurs interventions. Un peu moins d'un an après le début de l'expérience, il est difficile pour le chef de corps de dresser un bilan opérationnel. «C'est compliqué de jauger l'impact qu'a eu ces caméras sur le comportement des citoyens. En interne, il est toutefois clair qu'elles nous permettent d'améliorer nos procédures de travail en analysant notre manière d'intervenir, notamment en matière de gestion de groupe. Je pense par exemple aux interventions dans le cadre de bagarres impliquant de nombreuses personnes».

Lire aussi :L'équipement en bodycam des policiers sera strictement encadré

En effet, protéger les policiers est l'objectif principal de ces caméras. A l'époque, le chef de corps se souvient de l'hostilité grandissante qui régnait à l'égard des policiers de la part d'une partie de la population. Le chef de corps marchois explique avoir constaté une augmentation des violences physiques et verbales à l'égard des policiers.

Le choix des bodycams apparaissaient donc comme une évidence, pour son effet dissuasif. «Les policiers font encore et toujours face à ce genre de comportements et nous n'avons pas assez de recul pour savoir si les caméras ont tout de même permis de réduire ce phénomène. Toujours est-il que nos policiers se sont désormais approprié l'outil et se sentent plus en sécurité. Pour nous, c'est donc une réussite.»

Chez nous, on impose le port de la bodycam dans certains services et on laisse au policier le soin de décider, en fonction de la situation, s'il allume ou non la caméra.
Daniel Sommelette, chef de corps de la zone de police Famenne-Ardenne

Et pas question de faire du zèle pour autant. L'utilisation des bodycams en Belgique est régi par un certain nombre de règles. «La loi régissant l'utilisation des caméras embarquées s'inscrit dans le cadre de la «loi caméras», adoptée en 2018. Ensuite, en plus de ces règles communes, chaque zone dispense ses propres règles en matière d'utilisation. Par exemple, les policiers ne patrouillent pas en ville avec la caméra allumée en permanence. En plus de cela, chez nous, on impose le port de la bodycam dans certains services et on laisse au policier le soin de décider, en fonction de la situation, s'il allume ou non la caméra. D'autres zones, quant à elles, ne l'impose pas. Les policiers sont donc libres de choisir s'ils veulent partir avec, ou non».

Lire aussi :La province de Luxembourg adopte peu à peu les bodycams

Fin d'année 2022, un nouveau projet de loi régissant le dispositif permet ainsi le choix d'une activation manuelle de la caméra par le policier et non un enregistrement permanent. Selon l'agence Belga, elle peut par exemple être activée en cas de situation conflictuelle, mais aussi d'accident de la route ou encore de cambriolage.

Les enregistrements sont gardés 30 jours maximum avant destruction, sauf avis judiciaire.
Daniel Sommelette, chef de corps de la zone de police Famenne-Ardenne

Pour Daniel Sommelette, des règles communes au niveau de toutes les zones permettent un jugement plus «objectif». «Au niveau des règles plus générales, il y a forcément l'obligation pour le policier qui allume la caméra d'en aviser le ou les citoyens en face de lui. Ensuite, il y a des règles légales quant à la durée de conservation des images enregistrées. Les enregistrements sont gardés 30 jours maximum avant destruction, sauf avis judiciaire. Je pense aussi aux règles concernant la conservation des données. Seule une équipe sélectionnée peut les exploiter. L'utilisation des bodycams a également dû être approuvée sur chaque territoire communal. Si l'une ou l'autre commune avait refusé, ce qui n'a pas été le cas, nous n'aurions pas pu utiliser les bodycams sur leur territoire».

Bientôt des bodycams pour la zone de police d'Arlon

Dans ses doléances concernant le projet luxembourgeois, la commission des droits de l'homme déplorait notamment le fait qu'aucune procédure ne prévoit que les personnes filmées puissent avoir accès aux enregistrements. «Théoriquement, chez nous, les personnes concernées pourraient le réclamer. Mais tout dépend évidemment des circonstances, si la personne demandeuse est victime ou auteure, etc.».

Contacté, Michaël Collini, chef de corps de la zone de police d'Arlon-Attert-Habay-Martelange, frontalière au Grand-Duché, explique que sa zone bénéficiera également bientôt d'une trentaine de bodycams. «La commande est en cours et a été passée en début d'année. Nous avons également reçu l'aval des différents conseils communaux du territoire que nous couvrons.»

Sur le même sujet

Sur le même sujet