Le «super» hôpital de la province de Luxembourg a du plomb dans l'aile
Le projet de futur Centre Hospitalier Régional Centre-Sud a été recalé par la région wallonne. Un énorme coup dur pour les partisans de l'hôpital devant prendre place à Houdemont (Habay) mais une victoire importante pour ses détracteurs.
Nommé «Centre Hospitalier Régional Centre-Sud», ce futur hôpital doit permettre l'installation de 660 lits extensibles à 720 lits. © PHOTO: Visuel: Vivalia/A3Architecture
L'avenir des soins de santé s'assombrit de plus en plus dans la province de Luxembourg, frontalière au Grand-Duché. Le projet de «super» hôpital à Houdemont, dans la commune de Habay, vient d'être recalé par la région wallonne. Une sacrée tuile pour un projet devant, selon ses partisans, préserver les soins de santé dans une province particulièrement rurale.
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Petite remise en contexte: les hôpitaux du Luxembourg belge souffrent depuis de nombreuses années. Manque de spécialistes, manque d'infirmières, structures vieillissantes, la pandémie de covid-19 n'a fait que renforcer cette situation d'urgence. Vivalia, l'intercommunale de soins de la province et gérant notamment les hôpitaux d'Arlon, de Bastogne, de Libramont et de Marche, est bien consciente du problème. Elle planche ainsi depuis plus de 10 ans à une totale refonte du paysage médical de la province.
Après des années d'études en interne, Vivalia décide de dévoiler son plan baptisé «Vivalia 2025». L'idée est donc de conserver un hôpital aigu à Marche au Nord et de construire un tout nouvel hôpital plus au sud, le long de l'E411, à Houdemont (Habay). Quid des autres hôpitaux? Vivalia assurait à l'époque que ceux-ci constitueraient un maillage de polycliniques de proxy-urgence et ne nécessitant pas une hospitalisation.
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Le futur site se déclinait comme un hôpital à la pointe de la technologie. On parle ainsi d'un bâtiment devant voir le jour sur un terrain de 50 hectares, pour une surface totale de 80.000 m². Nommé «Centre Hospitalier Régional Centre-Sud», il devait permettre l'installation de 660 lits extensibles à 720 lits. Un immense site flambant neuf devant permettre d'attirer de nombreux spécialistes et ainsi résoudre les pénuries. On parlait, à l'époque, d'un budget total dépassant les 350 millions d'euros. Une station d'épuration devait également être construite sur le site de Vivalia, de même qu'un nouvel échangeur autoroutier sur l'autoroute, l'arrivée de l'hôpital au beau milieu des champs provoquant inévitablement une plus grande densité de la circulation.
De nombreux détracteurs dans le sud de la province
Seulement voilà, le projet «Vivalia 2025» est loin de faire l'unanimité. Pour les partisans, ce futur hôpital représente l'unique solution pour sauver les soins de santé en province de Luxembourg. Les détracteurs, eux, estiment que ce projet représente un désastre financier, social et écologique. Parmi les voix qui s'élèvent le plus contre le projet, on retrouve les bourgmestres des communes du sud de la province, dont celui d'Arlon, Vincent Magnus. Ce dernier veut «sauver» l'hôpital arlonais et pour y parvenir, l'homme s'est lancé dans un grand combat juridique contre l'intercommunale et son projet.
Peu importe pour Vivalia qui, en octobre 2021, déposait sa demande de permis unique pour entamer ce chantier faramineux. Confiante malgré le retard accumulé jusqu'ici (on tablait alors sur une ouverture en 2027 dans le meilleur des cas), l'intercommunale est littéralement tombée des nues en ce début de semaine.
Deux avis ont été rendus, l'un sur le plan environnemental et l'autre sur le plan urbanistique, ce dernier étant négatif
En effet, après une analyse méticuleuse des 33.750 pages composant la demande de permis, l'administration wallonne a refusé celle-ci. «Deux avis ont été rendus, l'un sur le plan environnemental et l'autre sur le plan urbanistique, ce dernier étant négatif», confirme Vivalia dans un communiqué.
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Un énorme coup dur pour l'intercommunale de soins de santé qui a toutefois assuré ne pas baisser les bras. «Nous poursuivons l'analyse objective de l'ensemble de la réponse, afin de mettre en place les stratégies adéquates pour poursuivre le projet», ont-ils précisé. A l'heure actuelle, tout indique qu’il sera proposé au conseil d'administration de Vivalia d’introduire un recours devant le gouvernement wallon, qui devrait se prononcer dans un délai d’environ 3 mois. «L'objectif sera de parvenir à concilier le respect de la réglementation et l’intérêt supérieur que représentent les soins de santé de la population de notre province, en tenant compte des spécificités de notre territoire».
Vivalia n'abandonne pas le projet
Vivalia souhaite donc tempérer et rassurer. «Cette démarche ne signifie en aucun cas l’abandon du projet. Les enjeux liés à ce projet de réorganisation des soins de santé en province de Luxembourg restent extrêmement importants : il en va de la pérennité d’une offre de soins de santé de qualité et de proximité pour tous les habitants de notre province. Il n’existe en effet aucune alternative à ce projet pour maintenir cette offre de soins en province de Luxembourg, dans la mesure où il ne sera plus possible de continuer à faire fonctionner à l’avenir nos hôpitaux comme cela est le cas actuellement».
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Par ailleurs, Vivalia assure que «l'avis environnemental rendu dans le cadre de cette décision souligne de nombreux éléments positifs dans le dossier». «Et nous conforte dans la légitimité de notre projet, tout comme cela avait déjà été le cas lors de l’octroi du financement pour la construction du CHR Centre-Sud et de l'échangeur autoroutier. Aujourd’hui, 4 mots caractérisent notre état d’esprit: sérénité, volonté, confiance et mobilisation. Notre volonté de continuer à défendre la pertinence de notre projet reste intacte. Nous restons plus que jamais confiants pour relever ce défi qui nous concerne tous.»