Les galères s'enchaînent sur la ligne vers Luxembourg
Le matériel roulant devient beaucoup trop vétuste, occasionnant des pannes et des retards à répétition sur la ligne 162 Bruxelles-Luxembourg. Pour l'association des Amis du Rail, défendant les droits des navetteurs belges et donc des frontaliers, la coupe est pleine.
L'association dénonce un manque de personnel ainsi que du matériel vieillissant. © PHOTO: Gerry Huberty
À en croire les témoignages qui s'accumulent, il ne fait clairement pas bon être un travailleur frontalier belge et usager du rail. Après une grève de plusieurs jours ayant fortement perturbé le trafic, c'est cette fois-ci au tour du matériel roulant de se rebiffer. Selon l'ASBL belge Les Amis du Rail, association de défense des lignes ferroviaires et des navetteurs, la situation «empire de jour en jour». «Il y a eu du mieux pendant tout un temps mais depuis quelques semaines, les retards et les pannes s'enchaînent. On a l'impression que les problèmes reviennent dès l'apparition du froid et que chaque année, aucune leçon n'est tirée de ces épisodes», explique Michael Jacquemin, porte-parole de l'ASBL Les Amis du Rail.
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Le coup de massue ayant eu lieu pas plus tard qu'il y a deux semaines sur la ligne 162, reliant Namur au Luxembourg. «Ce jour-là, un train est tombé en panne entre Marbehan et Libramont en raison d'un problème de voltage sur la ligne. Le conducteur doit réaliser une certaine opération afin de modifier la tension électrique sur la ligne, celle-ci étant différente sur certaines portions du trajet.»
Seulement voilà, une erreur de procédure a eu tôt fait de bloquer le train qui n'a ensuite plus pu redémarrer, laissant de nombreux usagers dans l'attente pendant de très longues heures. «Si bien que des voyageurs, excédés, ont pris la décision de forcer les portes du train afin de rejoindre la gare la plus proche à pied, dont certains avec leurs bagages.» Une décision dangereuse, les navetteurs ayant dû marcher le long des rails, mais difficilement blâmable au regard du calvaire vécu ce jour-là, d'autant que l'incident a généré une chaîne de retards et de suppressions d'autres trains.
La province de Luxembourg délaissée?
La coupe est pleine pour l'association qui dénonce un manque de personnel ainsi que du matériel vieillissant. «En particulier pour la province de Luxembourg qui semble être le parent pauvre belge en la matière», peste Michael Jacquemin.
De nouvelles rames sont pourtant en cours de livraison. Néanmoins, il semble que celles-ci ne remplaceront pas encore tout de suite les rames actuelles et vieillissantes. «Il y a eu pas mal de retard dans les livraisons, d'une part, et d'autre part, il faudra également que le travail d'homologation des rames soit réalisé afin que celles-ci puissent aussi circuler au Grand-Duché.»
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L'association parle donc d'un service qui se «dégrade». «Au moment même où la mobilité douce et les transports en commun sont plus que jamais prônés et que les abonnements de la SNCB vont augmenter leurs prix de 10%. C'est pour le moins paradoxal. Sans volonté politique et sans amélioration, on ne donnera pas envie aux gens de délaisser la voiture pour le train afin de se rendre au Luxembourg.» Sans compter des chantiers qui s'éternisent sur la ligne Bruxelles-Luxembourg et un projet de trains CFL dépassant la frontière luxembourgeoise qui ne sera pas déployé à court terme.
Des retards dans les livraisons
Contactée, la SNCB a reconnu une augmentation des pannes sur le rail de la province, tout en expliquant que celles-ci faisaient l'objet d'une analyse approfondie. Outre les causes externes liées notamment à des intrusions sur les voies, des vols de câbles ou encore des phénomènes météorologiques exceptionnels, la porte-parole reconnait que «la situation a été compliquée ces derniers temps pour les voyageurs de la province». «Notre matériel est vieillissant et nous faisons face à un retard de la livraison de notre nouveau matériel roulant».
Actuellement, sur les 445 nouvelles voitures à double étage commandées fin 2015, la SNCB dit n'en avoir reçu que 220 du constructeur ferroviaire Alstom. «La livraison des autres voitures - qui devait initialement être pour fin 2021 - a été reportée à fin 2023. Cela signifie que nous devons garder d'anciens trains en service plus longtemps que prévu, et ces anciens trains sont plus touchés par les pannes. Les nouveaux trains font face à moins de problèmes techniques que les trains plus anciens».
Davantage de rames en... 2026 !
Par ailleurs, on apprend qu'en 2026, des rames supplémentaires devraient également arriver, en plus de celles déjà commandées en 2015. Il faudra donc se montrer patient.
Enfin, concernant le manque de personnel, la SNCB n'a pu que confirmer ce déficit important. «Il est difficile pour nous de trouver des techniciens qualifiés pour effectuer les réparations sur notre matériel roulant. Dans la province de Luxembourg, le recrutement n'est en effet pas le plus aisé en raison des distances à parcourir, mais aussi de la pression salariale avec la proximité du Grand-Duché», estime la porte-parole.
L'objectif est pourtant ambitieux: en 2022, la SNCB souhaitait recruter 1.300 personnes. «L'objectif a été atteint. Et nous avons aussi décidé de recruter 300 effectifs complémentaires pour pouvoir assurer notre plan de transport. Pour l'an prochain, nous allons continuer le recrutement massif et organiser de nouvelles campagnes de recrutement. Principalement dans les fonctions opérationnelles.»