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«J'espère que d'autres pays suivront notre exemple»

Crise des réfugiés, fermeture des frontières, solidarité au sein de l'Union européenne, Jean Asselborn (LSAP) fait le point sur les conséquences de la pandémie de covid-19 au niveau international.

Jean Asselborn regrette l'absence de solidarité au sein de l'EU en matière de politique migratoire.

Jean Asselborn regrette l'absence de solidarité au sein de l'EU en matière de politique migratoire. © PHOTO: AFP

(ER avec DS) - Nos confrères du Luxemburger Wort ont rencontré le ministre des Affaires étrangères et européennes. Après avoir obtenu l'arrivée de douze mineurs non accompagnés en provenance de camps de réfugiés des îles grecques, le socialiste Jean Asselborn regrette qu'en matière de migration, «la solidarité ne joue plus».

Il a été annoncé que douze réfugiés mineurs non accompagnés des camps de Lesbos et de Chios allaient rejoindre le Luxembourg. Quand ces enfants arriveront-ils?

Jean Asselborn: «Nous espérons avoir des nouvelles la semaine prochaine. Les discussions avec le gouvernement grec, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et l'Organisation internationale des migrations (IOM) ont été positives et ce n'était pas facile. Caritas a accepté d'accueillir ces mineurs qui seront placés en quarantaine dès leur arrivée.

Ne craignez-vous pas que l'accueil des réfugiés soit critiqué par le public vu le contexte?

«C'est possible. Mais nous devons agir maintenant si nous attendons quelques mois, ce sera trop tard. Cette situation difficile concerne des personnes, pas des sacs de pommes de terre! Le Luxembourg a prouvé que c'est possible, que nous pouvons aider.

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J'espère que d'autres pays de l'UE suivront notre exemple. Si chaque pays accueillait dix enfants par 500.000 habitants, l'Union pourrait offrir des perspectives à environ 5.000 jeunes. Mais jusqu'à présent, à l'exception du Luxembourg, seuls l'Allemagne, la France, la Finlande, le Portugal et l'Irlande sont prêts.

L'épidémie a relégué au second plan le problème des réfugiés. Cela fait des années que l'Europe cherche en vain une solution à la crise migratoire...

«C'est vrai. Mais à l'heure actuelle, il n'y a pratiquement pas de nouveaux réfugiés débarquant en Europe. Nous avons besoin de règles pour une répartition équitable des réfugiés, nous avons besoin de quotas. Mais nous sommes loin d'une telle solution. Il n'y a jamais eu de politique européenne commune en matière de migration.

Je ne peux pas imaginer que l'Allemagne, les Pays-Bas ou l'Autriche ne feront rien pour soutenir l'Italie et l'Espagne.

Une crise économique se profile derrière la crise sanitaire. L'UE sera-t-elle capable de relever ce double défi?

«On doit y arriver. Tout n'est pas négatif. Il existe une profonde sympathie entre les Européens. L'Allemagne et le Luxembourg ont accueilli des patients de la région du Grand Est. Dans les deux pays les plus touchés par la pandémie en Europe - l'Italie et l'Espagne - les gens chantent également l'hymne européen. Ils croient donc toujours en l'Europe. Une Europe sans l'Italie, sans l'Espagne est impensable. La banque centrale européenne a débloqué 750 milliards d'euros, la Commission a temporairement suspendu les critères de Maastricht, la Banque européenne d'investissement veut créer un fonds de garantie de plusieurs milliards pour les petites et moyennes entreprises, ce sont de bonnes décisions.

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Et si cela ne suffit pas ?

«La question cruciale est la suivante. Nous devons trouver un système qui nous permettra d'aider les pays qui en ont vraiment besoin. Je ne peux pas imaginer que des Etats tels que l'Allemagne, les Pays-Bas ou l'Autriche ne feront rien pour soutenir les pays du sud comme l'Italie et l'Espagne.

Dans quelle mesure le ministère des Affaires étrangères est-il impliqué dans le traitement de la crise du coronavirus?

«Actuellement, je suis surtout préoccupé par la fermeture des frontières. L'Allemagne les a fermées sans avertissement. Il y a une barrière sur le pont à Schengen, 35 ans après la signature du traité. Que des frontières extérieures de l'UE soient fermées est une preuve de l'ampleur de la crise. Mais les frontières intérieures doivent rester ouvertes. Si Schengen ne survit pas, alors l'idée européenne ne pourra plus trouver sa place. Schengen et la monnaie unique sont les plus grandes réalisations de l'UE. Je ne sais pas pourquoi l'Allemagne a clos ses frontières. Un virus ne peut pas être détecté par un fonctionnaire des douanes.

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Heureusement, la situation s'est quelque peu améliorée. Il n'y a que dans le nord du pays que cela reste encore difficile. A cause du nombre élevé de navetteurs, la fermeture des frontières a de graves conséquences pour le Luxembourg. Si les frontières étaient complètement fermées, tout s'effondrerait, les fonctions vitales de l'Etat seraient touchées. La Grande Région est un morceau de vie de l'Europe, les quatre pays ont grandi ensemble. Si la situation venait à perdurer plus longtemps, les frontières pourraient à nouveau surgir dans l'esprit des gens. La libre circulation des personnes pourrait être remise en cause.

Le ministère des Affaires étrangères est également responsable du rapatriement des citoyens luxembourgeois.

«Nous prenons cette mission très au sérieux. Jusqu'à présent, nous avons ramené environ 400 citoyens chez eux. Mais il y a encore du travail. L'équipe de crise est composée de 24 diplomates qui travaillent sans relâche. Je tiens à souligner la solidarité européenne. La France et l'Allemagne ont rapatrié des Luxembourgeois. De notre côté, nous avons ramené depuis le Cap-Vert des citoyens de sept nations différentes. Dans toute l'UE, 300.000 personnes ont à ce jour été ramenées chez elles, 350.000 autres attendent toujours d'être rapatriées chez elles.»

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