L'Europe n'apprend plus l'allemand mais pourrait s'y remettre
Les Européens apprennent de moins en moins l'allemand au lycée, mais la langue de Gœthe n'a peut-être pas dit son dernier mot, de plus en plus de jeunes diplomés des pays du sud étranglés par la crise considérant l'Allemagne comme un eldorado.
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Les Européens apprennent de moins en moins l'allemand au lycée, mais la langue de Gœthe n'a peut-être pas dit son dernier mot, de plus en plus de jeunes diplomés des pays du sud étranglés par la crise considérant l'Allemagne comme un eldorado.
Selon le ministère allemand des Affaires étrangères, «un renversement de tendance dans l'apprentissage de l'allemand» est en effet observé «dans de nombreux pays, notamment grâce aux mesures de promotion lancées en 2010».
Et avec la crise de la dette en zone euro, de plus en plus de jeunes diplômés originaires des pays du sud de l'Europe viennent chercher du travail en Allemagne, comme les médecins ou ingénieurs grecs.
Du coup, les établissements dispensant des cours pour adultes font le plein de nouveaux élèves. En 2011, la demande dans les instituts Gœthe a explosé dans l'Europe du sud-ouest: +18,20% comparé à 2010, soit la plus forte progression de toutes les régions du monde. En Espagne, la hausse atteint 25% avec un pic de 27,65% à Madrid dans ces établissements semi-publics.
Toutefois dans les écoles, «l'allemand recule au profit de l'anglais. Beaucoup de jeunes Européens font l'expérience de pouvoir communiquer dans cette langue en Allemagne. Du coup, ils ne sont pas très motivés pour en apprendre une autre», explique Ulrich Ammon, professeur de linguistique germanique à l'Université de Duisbourg-Essen.
Seul un élève français sur cinq apprend encore l'allemand
Selon une récente étude de l'Office européen des statistiques, Eurostat, réalisée entre 2005 et 2010 parmi les élèves âgés de 15 à 20 ans, ils n'étaient plus que 44% aux Pays-Bas, contre 86% cinq ans plus tôt, 35% au Danemark, contre 50% auparavant et 52% en Pologne, contre 73%.
En France, seuls 22% des élèves apprenaient encore l'allemand en 2010, selon Eurostat, qui ne disposait pas des chiffres pour 2005.
Avant la chute du rideau de fer, de nombreux élèves de pays communistes apprenaient l'allemand. «L'Union soviétique n'encourageait pas l'enseignement de l'anglais dans les pays satellites. L'allemand de Karl Marx et Friedrich Engels offrait une alternative parfaite, d'autant plus qu'il était parlé dans un pays frère, la RDA, qui passait pour très développé», commente M. Ammon.
Avec la fin de l'URSS, les Européens de l'Est se sont tournés vers l'anglais, la langue du monde qui leur était jusqu'alors interdit.
Pour la chambre de commerce et d'industrie allemande (DIHK), «avec le manque croissant de main-d'œuvre spécialisée, l'Allemagne dépend de plus en plus de l'immigration. Et si les étrangers ne parlent pas allemand, notamment dans certaines PME qui ne sont pas tournées vers l'international, cela peut poser problème. Certaines réagissent en dispensant des cours à leurs salariés étrangers».
La langue maternelle la plus parlée dans l'UE
L'allemand est la langue maternelle la plus parlée dans l'UE avec 92 millions de locuteurs sur un demi milliard d'habitants. Outre l'Allemagne, l'Autriche et le Luxembourg, il existe des minorités germanophones en Belgique et en Italie.
Pourtant la langue de Goethe est moins utilisée que le français et l'anglais dans les institutions européennes. Une situation que l'Association pour la défense de la langue allemande, créée en 1997 et forte de 34.000 membres --dont beaucoup de professeurs étrangers-- s'emploie à corriger partiellement.