La Belgique accélère la prolongation du nucléaire
Deux centrales continueront à fonctionner sans être mises à l’arrêt le temps de leur rénovation, contrairement à ce qui était initialement prévu.
Il y a tout juste un an, le gouvernement De Croo a décidé de prolonger l’activité de Doel 4 et de Tihange 3 jusqu’en 2035. © PHOTO: Getty Images/iStockphoto
De notre correspondant Max HELLEFF (Bruxelles)
Ceux qui pensaient en avoir fini avec la saga nucléaire belge en sont pour leurs frais. Lundi, le gouvernement De Croo a demandé à l’énergéticien français Engie d’étudier un scénario qui aboutirait à prolonger l’activité des centrales de Doel 4 (Anvers) et Tihange 3 (Huy) sans les mettre à l’arrêt pendant les hivers 2025-2026 et 2026-2027 pour procéder à leur rénovation, contrairement à ce qui avait été initialement prévu. Parallèlement, il n’a pas rejeté la prolongation éventuelle de réacteurs plus anciens.
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Il y a tout juste un an, le gouvernement De Croo a décidé de prolonger l’activité de Doel 4 et de Tihange 3 jusqu’en 2035 - alors que la Belgique aurait dû abandonner officiellement l’atome en 2025. Mis sous pression par la guerre en Ukraine et à défaut d’avoir développé suffisamment les énergies alternatives, ce choix fut fait pour éviter au pays de manquer d’électricité. Mais ce choix s est aussi révélé rapidement insuffisant.
Après avoir pris avis auprès de l’Agence fédérale de contrôle nucléaire, le gouvernement est semble-t-il prêt à passer la vitesse supérieure : Doel 4 et Tihange 3 seront bien prolongés, ce que l’on savait donc déjà, mais les arrêts programmés durant les hivers 2025-2026 et 2026-2027 pour les rénover seront supprimés. Ces deux réacteurs sont réputés robustes, leur sécurité ne serait pas en cause, estiment des experts. Leur rechargement limité durant l’été 2025 permettrait d’étaler davantage les travaux nécessaires à la prolongation de leur activité.
Maintenir cinq réacteurs en vie selon le ministre
Le gouvernement De Croo n’abandonne toutefois pas pour l’instant l’idée de prolonger la vie d’autres centrales, quoique plus âgées. Une partie des partenaires de la coalition au pouvoir pousse dans ce sens. Le vice-Premier ministre David Clarinval (Mouvement réformateur, libéral francophone) a répété qu’il faudrait maintenir en activité non pas deux mais cinq réacteurs. Une solution doit être trouvée avant la fin mars.
Lundi encore, Alexander De Croo a émis le souhait que la Belgique ait un statut d’observateur au sein du groupe pronucléaire mené par la France. Des contacts diplomatiques vont être lancés afin que le pays soit associé aux onze États qui ambitionnent de porter des projets de haute technologie liés à l'atome.
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S’il a été beaucoup question de prolongation du nucléaire ces derniers mois en Belgique, les centrales à gaz de nouvelle génération ne sont pas pour autant rangées au placard. Engie-Electrabel, qui a remporté l’appel d’offres pour la construction de l’une d’entre elles aux Awîrs (Flémalle, province de Liège), n’ a pas laissé tomber le projet.
La centrale à charbon des Awirs, vieille de 70 ans, est actuellement en cours de démolition pour faire place à une nouvelle centrale à gaz de 875 mégawatts. Cette dernière doit être achevée en novembre 2025, date à laquelle les sept réacteurs que compte le pays auraient dû être mis définitivement à l’arrêt. On sait maintenant que certains d’entre eux survivront à cette échéance. La nouvelle centrale à gaz devra donner à la Belgique une partie de la capacité de production d’électricité manquante.
Pour construire cette nouvelle unité, Engie-Electrabel s’était lié à l’entreprise chinoise Sepco3. Mais cette collaboration a été décriée tant par la sûreté de l’Etat que par le monde politique flamand. Pour résumer : mettre une infrastructure aussi sensible entre les mains de la Chine n’irait pas sans danger. On parle d’ingérence étrangère et d’espionnage. Engie a donc résilié son contrat avec Sepco3.