La Belgique fait face à une hécatombe
Bien qu’il ait réussi pour l’instant à ralentir la propagation de la pandémie, le pays déplore une hausse impressionnante des décès.
Le roi Philippe n'a pas hésité à venir encourager soignants et patients d'un hôpital de Bruxelles. © PHOTO: AFP
De notre correspondant Max HELLEFF (Bruxelles) - Le paradoxe est douloureux. Alors que le nombre d’hospitalisations et de personnes soignées en soins intensifs semble sous contrôle, les morts attribués au Covid-19 n’ont jamais été aussi nombreux. Vendredi, 496 nouveaux décès ont été enregistrés, portant à 3019 les personnes qui ont perdu la vie des suites du coronavirus
Cette hécatombe donne lieu à des scènes surréalistes de corbillards venus déposer les morts dans des chambres froides de substitution, à défaut de trouver de la place dans les morgues. La commune bruxelloise d’Auderghem a ainsi réquisitionné les grands frigos d’un hall omnisports. A Liège, un camion frigorifique a été mis à disposition pour les pompes funèbres qui seraient dans l’incapacité de conserver les dépouilles.
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Beaucoup de victimes du coronavirus sont décédées chez elles, avant qu’une hospitalisation ait pu être envisagée. Mais, à défaut de pouvoir appréhender ces drames vécus dans l’intimité, c’est vers les maisons de repos que se concentre plus que jamais l’attention.
«Près de 800 morts sont recensés dans les institutions wallonnes et bruxelloises. Le drame qui se jouait jusque-là à huis clos explose au grand jour. L’épidémie frappe d’autant plus fort les maisons de repos qu’elles doivent se battre sur plusieurs fronts à la fois. Entre le manque de matériel, de personnel ou de tests, la bataille sera longue et incertaine », écrit Le Soir. En Flandre, mardi, il était question de 619 décès en séniories.
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La pénurie de masques est l’une des premières causes du drame que vivent les «homes». Le personnel soignant introduit le virus malgré lui dans les chambres où les aînés sont confinés depuis un mois. L’épidémie fait alors des ravages parmi les plus fragiles. Mais pas seulement : une aide-soignante et une infirmière viennent de succomber au Covid-19.
Ces deux décès sont rapportés alors qu’une nouvelle cargaison de trois millions de masques viennent d’être déclarés inutilisables par le ministre Philippe De Backer. Le libéral flamand, qui dirige la task-force chargée de donner à la Belgique le matériel nécessaire pour vaincre l’épidémie, n’a pu que constater ce nouvel échec jeudi en Chambre des représentants. « Une inspection visuelle a révélé que les masques commandés n'avaient pas de marquage CE correct», a-t-il expliqué. Il s’agissait de FFP2, censés offrir la meilleure protection au personnel médical dans le cadre de la lutte contre le virus.
Tous les regards se sont à nouveau tournés vers la ministre fédérale de la Santé Maggie De Block, accusée par le personnel soignant d’être à l’origine de l’impréparation du pays face à la pandémie. Pour parer au plus pressé, des stratégies de remplacement se mettent en place. Le gouvernement wallon souhaite ainsi inaugurer une entreprise de fabrication de masques chirurgicaux à Fleurus (Charleroi), d’ici la fin du mois de mai.
Il n’y a toutefois pas que les masques qui manquent. Ainsi en va-t-il des sur-blouses protégeant le personnel soignant. Ici, la Wallonie se tourne vers des couturières bénévoles pour assurer le travail.
Le lourd bilan humain attribué au coronavirus et les difficultés que rencontrent les soignants ne laissent aux autorités et aux scientifiques d’autre alternative que de recommander de suivre encore et toujours les consignes de confinement. Le Conseil national de sécurité se réunira à nouveau mercredi. Il pourrait en toute hypothèse décider de relâcher la pression, d’esquisser les premières étapes d’un déconfinement. Mais personne n’y croit vraiment.