La Belgique reste de marbre face à Zelensky
Beaucoup d'empathie mais pas de nouvelles aides pour l’Ukraine après l'intervention filmée de son président devant la Chambre.
Les parlementaires belges ont assuré le président ukrainien de leur empathie. © PHOTO: AFP
La photo du président Volodymyr Zelensky captée sur l’écran de la Chambre s'étale en une des journaux belges ce vendredi matin. Ses mots sont repris partout : «La paix a plus de valeur que les diamants».
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Après la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni ou encore les Etats-Unis, c’est à la Belgique que le chef d'Etat ukrainien s'est adressé jeudi afin qu'elle aide son peuple à combattre les troupes russes. Il a pris en exemple le sort dramatique de Marioupol et de sa population civile qui n'a «rien de ce qui est nécessaire pour survivre (…) Aujourd'hui, c’est l'enfer sur terre (...) mais personne n'a la détermination pour arrêter la catastrophe».
«Pire que la bataille d'Ypres»
Selon Volodymyr Zelensky qui a pris l’habitude de faire référence aux guerres qu'ont vécues ses interlocuteurs occidentaux, Marioupol «est peut-être pire que la bataille que vous avez connue à Ypres». C'est là que l’armée belge a tenu tête aux troupes du Kaiser pendant quatre ans avant que les grandes offensives alliées de 1917 et 1918 ne conduisent à la victoire.
«Si les défenseurs de Marioupol perdent, il n'y aura plus d'Union européenne forte», a ajouté le président ukrainien. T-shirt vert et regard martial, il s'est fait accusateur : «On a l'impression que les Européens n'ont pas assez de courage pour nous aider.»
«Aidez-nous!»
Volodymyr Zelensky s'en est alors pris au commerce de diamants anversois. «Je pense que la paix a beaucoup plus de valeur que les diamants, que les accords avec la Russie, que les bateaux russes dans les ports, plus aussi que le pétrole et le gaz russes, donc aidez-nous !», a-t-il lancé aux parlementaires et aux responsables des différents gouvernements.
Des mots forts qui ont rappelé à tous que le commerce des pierres précieuses s'accommode trop facilement des guerres et des malheurs du monde, en dépit des règles et des lois qui prohibent les «diamants de sang». En 2021, selon La Libre Belgique, «Anvers a importé pour environ 1,8 milliard de dollars de diamants bruts de Russie, soit 25 % de l’ensemble des gemmes importées dans la métropole anversoise.»
Mais pas de quoi déstabiliser Alexander De Croo pour qui «bloquer le commerce de diamants avec la Russie ne ferait que déplacer la plaque tournante vers les pays du Golfe.» Il a rappelé que c'est au niveau européen que doit se faire un éventuel élargissement des sanctions et que «l'armée belge a commandé de nouvelles armes pour l’Ukraine», après celles envoyées fin février.
Un reportage récent de la RTBF consacré à un entraînement de résistants ukrainiens a montré un casque manifestement venu des stocks de l'armée belge, apportant un début de preuve au fait que la Belgique tient bien la promesse de livrer des armes (au moins de protection) à l'Ukraine.
De l'empathie mais pas d'action
Alexander De Croo lancera encore un «l'Ukraine vaincra, la liberté finira par l’emporter, gardez la foi !», tout en rappelant que «l'Otan n’est pas partie prenante à ce conflit», qu'il faut se garder de «jeter tout le continent dans la guerre» et d'y «engendrer une crise économique très très grave.»
En coulisses, la majorité a fait bloc derrière le Premier ministre, assurant l'Ukraine de son empathie, mais sans plus. Une voix discordante est toutefois venue des écologistes qui demandent d'arrêter les importations de diamants russes.
Dans l’opposition, le communiste Raoul Hedebouw est favorable à l'interdiction du «commerce des diamants qui va directement aux oligarques.» «Mais pour le reste, ajoute-t-il, il y a 10.000 emplois en balance dans le secteur, ne parlons pas de l’impact social si on devait pénaliser l'activité du port d’Anvers…»