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Le choix de raison de Paul Magnette

Le socialiste belge est prêt à discuter avec la N-VA de Bart De Wever. Il ne ferme pas la porte à une nouvelle réforme de l’État.

Le président du PS se dit prêt à s'asseoir à la table des négociations avec la N-VA.

Le président du PS se dit prêt à s'asseoir à la table des négociations avec la N-VA. © PHOTO: AFP

Max Helleff

De notre correspondant, Max Hellef (Bruxelles) - Paul Magnette a maintes fois répété qu'il ne pactiserait pas avec la N-VA de Bart De Wever. Mais aujourd'hui, quelque 420 jours après les législatives du 26 mai 2019, les socialistes francophones n'ont visiblement d’autre choix que de discuter avec les nationalistes flamands. «On peut envisager de gouverner avec la N-VA, déclare Paul Magnette. Ce qui compte, c'est le contenu. (…) On a peut-être les mains sales mais au moins on a des mains, au moins on se bat pour changer la vie des gens.» Le président du PS est donc prêt à s'asseoir à la table de négociations, quitte à se «salir les mains».

Six formations politiques sont actuellement en pourparlers pour donner un nouveau gouvernement à la Belgique sous l'égide des trois partis toujours au pouvoir, à savoir les libéraux francophones, les libéraux et les chrétiens-démocrates flamands. Paul Magnette devrait les rejoindre, tout en affirmant qu'il vaut encore mieux ne pas avoir de gouvernement qu'un mauvais gouvernement. Il n'entrouvre pas moins la porte à une discussion sur une nouvelle réforme de l'État, même s'il se garde de toute main tendue vers le confédéralisme cher à Bart De Wever. Pour le socialiste, il faut un «découpage clair»: ou une compétence est pleinement régionale ou elle est pleinement fédérale.

Il n'est plus question aujourd'hui d'une gestion suédoise. La situation est différente»

La gestion de la crise sanitaire, il est vrai, a démontré l'inefficacité du modèle institutionnel belge, en dépit (ou à cause) de ses neuf ministres de la Santé.

La sortie de Paul Magnette a reçu un écho positif, notamment du côté des chrétiens-démocrates flamands, toujours scotchés à la N-VA de Bart De Wever. Leur leader Joachim Coens s'est voulu rassurant pour les socialistes: «Il n'est plus question aujourd'hui d'une gestion suédoise. La situation est différente», a-t-il commenté en prenant ses distances vis-à-vis de l'ex-gouvernement Michel («La Suédoise») dont son parti fut pourtant une composante. Quant au chef de groupe de la N-VA à la Chambre, Peter De Roover, il conclut qu'il ne faut pas gâcher une opportunité.

Les Verts sur la défensive

Les esprits seraient-ils mûrs pour donner à la Belgique un nouveau gouvernement fédéral? On pourrait le croire en première analyse. Le PS, entend-on dans ses rangs, ne veut pas laisser à la droite la manne financière européenne qui doit permettre demain à la Belgique de faire face à la crise économique. Ne pas être aux commandes pour exiger que cet argent serve à financer de nouvelles politiques sociales serait impardonnable. Pire: le social pourrait être récupéré par la droite, ce qui vaudrait aux «rouges» relégués dans l'opposition de se faire rosser dans les urnes par les communistes du PTB. Il faut enfin éviter que les socialistes flamands ne se rangent dans la coalition «Arizona» à laquelle rêvent les partis au pouvoir. Ce serait un désastre pour le PS francophone.

Guidée par la raison, la volte-face de Paul Magnette lui promet déjà des inimitiés. Les écologistes francophones qui gouvernent avec les socialistes en Wallonie et à Bruxelles sont sur la défensive. «J'ai parfois difficile à suivre le raisonnement du PS», s'énerve le coprésident des Verts Jean-Marc Nollet, en faisant remarquer que jusqu'ici «les socialistes avec la N-VA, ce n'était pas possible (…) Puis, trois semaines après, on apprend qu'ils sont demandeurs».

A la Chambre jeudi, la Première ministre Sophie Wilmès a remercié les représentants des partis pour avoir été à ses côtés durant la crise sanitaire. Ces remerciements en forme d'au-revoir annoncent peut-être le changement de gouvernement tant attendu à la rentrée.

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