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Santé

Les maisons de repos belges paient la facture du covid

La surmortalité a poussé nombre de pensionnaires et de familles à tourner le dos à un système incapable de les protéger suffisamment.

Bien avant la campagne vaccinale, trop de négligences ont été constatées dans les homes seniors.

Bien avant la campagne vaccinale, trop de négligences ont été constatées dans les homes seniors. © PHOTO: AFP

Max Helleff

De notre correspondant MAX HELLEFF (Bruxelles) - En Belgique, un nombre important de décès du covid ont eu lieu en maison de retraite. Combien exactement? Impossible à préciser. La mort constatée, les défunts ont le plus souvent été inhumés ou incinérés sans qu’une autopsie ne soit pratiquée. Certains pensionnaires sont probablement décédés à la suite d’autres pathologies. L’objectif poursuivi par les autorités était d’éviter par tous les moyens la transmission de la maladie.

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Cette situation cauchemardesque correspond essentiellement au premier confinement qui s’est étalé tout au long du printemps 2020. Il a laissé un souvenir douloureux dans les familles, interdites d’approcher les aînés cloîtrés dans leur chambre. Il fut alors beaucoup question du syndrome de glissement : privés de contacts avec leurs proches, les seniors se laissaient mourir par désespoir.

Ce drame a eu des conséquences immédiates. A la première occasion, des centaines de familles ont demandé que leurs aînés réintègrent les foyers. Elles ont perdu confiance dans le système. Et les maisons de retraite qui étaient jusque-là prises d’assaut, incapables d’accueillir toutes les personnes âgées nécessitant soins et assistance, se sont retrouvées avec des lits inoccupés.

Une image dégradée

Les Mutualités Libres viennent de sortir un rapport qui objective cette situation à Bruxelles et en Wallonie. En un an, de 2019 à 2020, la fréquentation des maisons de repos a diminué de 6,5% alors que la demande était jusque-là en croissance. Une donnée laisse songeur : pendant les deux premières vagues de la pandémie, la surmortalité s’est élevée respectivement à 31% et à 39% dans les séniories wallonnes et bruxelloises.

Une telle situation a conduit les personnes âgées toujours valides à chercher une alternative dès qu’elles en ont eu l’opportunité. Elles ont préféré retourner vivre seules ou auprès de leurs proches, plutôt que de risquer d’être de nouveau prises au piège

«L’image des maisons de repos a été fortement ternie pendant la crise du covid-19 et ce n’est rien de le dire», a confié au micro de la chaîne publique RTBF Vincent Frederricq, secrétaire général de Femarbel, la fédération des maisons de repos privées. Il met en cause la gestion de la pandémie par ce qui était alors le gouvernement fédéral de Sophie Wilmès : «Le testing a été au début une catastrophe et ce n’est qu’à partir du moment où on a reçu du matériel de soins et que le testing a fonctionné qu’on a repris un contrôle extrêmement rapide de la situation».

Il veut «d’ici à l’automne» travailler à redonner «une image correcte et véritable des maisons de repos».

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Le drame des maisons de retraite a plus d’une fois valu au monde politique d’être pointé du doigt. A l'image de ce qui s'est passé au Luxembourg, avec la mise en cause de la ministre Corinne Cahen.

Du côté de Bruxelles, ce marasme aurait pu être évité, lui est-il reproché, si la Belgique s’était dotée en temps et heure du matériel de protection (masques, charlottes, tabliers, etc.) qui allait lui faire cruellement défaut pendant le premier confinement. Un minimum de prévoyance et de logistique aurait permis de sauver beaucoup de pensionnaires.

En février dernier, le ministre régional de la Santé Alain Maron avait sorti devant la commission d’enquête du Parlement bruxellois qui l’interrogeait cette phrase sortie d’une directive à la froideur toute administrative : «L’établissement ne doit envoyer l’un de ses résidents à l’hôpital qu’en cas de stricte nécessité. L’évaluation du résident et son transfert à l’hôpital ne peuvent être plus stricts qu’avant et ne doivent pas être influencés par la situation actuelle…»

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