Obama défie le Congrès sur les détentions militaires de suspects
Le président des Etats-Unis, Barack Obama, s'est donné toute latitude mardi pour éviter le transfèrement en détention militaire d'étrangers suspects de terrorisme, en déployant un arsenal de restrictions à une loi qui lui avait été imposée par le Congrès.
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Le président des Etats-Unis, Barack Obama, s'est donné toute latitude mardi pour éviter le transfèrement en détention militaire d'étrangers suspects de terrorisme, en déployant un arsenal de restrictions à une loi qui lui avait été imposée par le Congrès.
La Maison Blanche a divulgué mardi soir les décrets d'application de la loi du financement du Pentagone, que M. Obama avait promulguée le 31 décembre avec néanmoins de «fortes réserves sur certains articles qui réglementent la détention, l'interrogation et les poursuites de suspects de terrorisme».
Ce texte, issu d'un Congrès où les adversaires républicains de M. Obama sont en position de force, impose en effet que les suspects non américains affiliés à Al-Qaïdah, complotant ou conduisant des attentats contre les Etats-Unis, soient déférés devant la justice militaire et non de droit commun.
Mais M. Obama, qui est candidat à sa réélection en novembre, avait prévenu qu'il exercerait le droit, prévu par le texte, d'émettre des dérogations dans des décrets d'application dont la publication était prévue dans un délai de deux mois.
Au terme du décret d'application révélé lundi, la détention militaire d'un suspect n'aurait lieu qu'en ultime recours, vu les multiples conditions restrictives que ce texte instaure.
Il souligne qu'une détention militaire «peut seulement s'appliquer aux non-ressortissants américains, liés de près à Al-Qaïdah et qui ont participé, planifié ou effectué un attentat ou une tentative d'attaque contre les Etats-Unis et nos partenaires de la coalition» contre la nébuleuse extrémiste.
Un transfèrement d'un suspect de terrorisme à la justice militaire ne pourra avoir lieu «qu'après une évaluation scrupuleuse de tous les faits pertinents, sur la base du jugement de l'équipe de sécurité nationale du président», selon la Maison Blanche.
En outre, le ministre de la Justice, le secrétaire d'Etat, le secrétaire à la Défense, le secrétaire à la Sécurité intérieure, le chef d'état-major interarmées et le directeur du renseignement (DNI) devront à l'unanimité donner leur blanc-seing à une telle procédure, selon la même source.
Respect de la coopération antiterroriste
Un transfèrement à la justice militaire ne doit pas avoir lieu s'il va à l'encontre de la coopération antiterroriste, ou dans le cas où un gouvernement étranger refuserait d'extrader un suspect en raison de sa possible détention par l'armée, précise ce décret.
Si la détention militaire était déjà exclue pour tout ressortissant américain au titre de la loi votée par le Congrès, elle n'est pas non plus envisageable pour un «résident permanent légal» aux Etats-Unis arrêté sur le territoire américain ou pour des faits commis sur le territoire américain, selon ce décret.
Ce texte prévoit aussi une orientation d'un suspect vers la justice civile «si son transfèrement en détention militaire interfère avec des tentatives d'obtenir (sa) coopération ou (ses) aveux».
Obama prend ses précautions après l'échec de Guantanamo
Ce cadre juridique contraignant établi par la Maison Blanche intervient alors qu'elle n'a pas réussi à fermer la prison militaire de Guantanamo, malgré la promesse de M. Obama de mettre fin, dans l'année suivant son arrivée aux affaires, aux opérations de ce symbole de la «guerre contre le terrorisme» de son prédécesseur George W. Bush, et où se trouvent encore quelque 170 détenus.
Et l'administration démocrate, après avoir souhaité un procès fédéral civil, a dû se résoudre à faire juger à Guantanamo, devant un tribunal militaire d'exception, les cinq hommes accusés d'avoir organisé les attentats du 11-Septembre, dont leur «cerveau» présumé Khaled Cheikh Mohammed.