Quand Bart De Wever évoque le retour aux urnes
S’il n’y a pas de gouvernement belge en mai, alors l’appel à de nouvelles élections est peut-être «inévitable», estime le nationaliste flamand. A ses risques et périls.
Par ses déclarations, Bart De Wever a-t-il voulu donner un coup de pouce à Koen Geens? © PHOTO: AFP
De notre correspondant, Max Hellef (Bruxelles) - Il est beaucoup question d’élections anticipées en Belgique ces derniers jours. Lundi, Bart De Wever a estimé que le mois de mai prochain pourrait être «une date symbolique» pour faire un bilan. Il y aura alors un an que les Belges se sont rendus aux urnes. S’il n’y a pas de gouvernement d’ici là, «l'appel à de nouvelles élections est peut-être inévitable», a convenu le nationaliste flamand.
D’aucuns ont vu dans cette déclaration un coup de pouce au «missionnaire» Koen Geens, le chrétien-démocrate (CD&V) qui a été désigné par le roi Philippe vendredi dernier pour tenter un dernier rapprochement entre la N-VA nationaliste flamande et le Parti socialiste francophone. Geens n’a cessé au cours des dernières semaines de plaider pour que la prochaine coalition gouvernementale soit soutenue par une majorité de députés flamands, d’où la nécessité d’embarquer dans le prochain gouvernement la puissante N-VA. Et bien sûr son propre parti: le CD&V.
Koen Geens a été désigné par le roi Philippe vendredi pour tenter un rapprochement entre la N-VA nationaliste flamande et le Parti socialiste francophone © PHOTO: AFP
De premiers pourparlers ont eu lieu. De Wever a rencontré Koen Geens, devenu son meilleur allié s’agissant d’un retour au fédéral. «Koen Geens a commencé le travail immédiatement», a expliqué le leader de la N-VA. «On m'a assuré que le plan A est de constituer une coalition "violet-jaune" (socialistes, libéraux, N-VA, CD&V). Nous verrons si cela peut se réaliser.»
De Wever n’est pas rancunier, du moins en cette occasion. Vendredi, il s’attendait à être appelé par le roi pour explorer à son tour les possibilités de fonder une coalition fédérale. Mais le souverain a de toute évidence voulu tester une dernière voie parallèle avant de lancer le leader de la N-VA dans l’arène, sachant que son arrivée risquait de braquer définitivement les socialistes francophones.
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Car Bart De Wever n’a pas abandonné l’idée de transformer la Belgique en un Etat confédéral qui donnerait davantage de compétences aux Régions au détriment de sa structure centrale. Une telle mutation implique toutefois d’obtenir une majorité des deux tiers et une majorité dans chaque groupe linguistique à la Chambre. «Nous ne les avons pas. Donc, d'un point de vue théorique, le confédéralisme est justifié mais il n'est pas opérationnalisable», a admis le nationaliste flamand. Il a ajouté ne pas vouloir «prendre de risque inconsidéré à l'égard de la prospérité», histoire de rassurer cette majorité de Belges qui ne veut pas d’une scission du pays.
Bart De Wever prend un risque en s'avançant sur le terrain électoral. Il convient d'ailleurs qu'il n’est jamais bon en politique de s'enfermer dans un agenda, a fortiori quand celui-ci dépend d'une multitude de facteurs. Et, surtout, du bon vouloir des socialistes à s'allier à la N-VA.
Un paysage politique plus fracturé que jamais
Les nationalistes flamands ont en réalité tout à perdre dans les urnes. En Flandre, ils sont désormais talonnés par le Vlaams Belang (extrême droite), qui pourrait profiter du mécontentement des électeurs pour devenir le premier parti de Belgique. Au contraire, le PS francophone a combattu depuis le début le confédéralisme de Bart De Wever: il passe désormais pour le garant de l’unité et de la survie de la Belgique aux yeux des francophones.
Si de nouvelles élections devaient avoir lieu, estiment les experts, le paysage politique en sortirait plus fracturé que jamais: à une Flandre toujours plus à droite répondraient une Wallonie et Bruxelles davantage ancrées à gauche. Mais pour cela, il faudrait que le Parlement issu des élections du 26 mai dernier se saborde. On n'en est pas encore là.