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Energie

Quand «Vert» rime avec nucléaire

Non seulement la Belgique ne fermera pas toutes ses centrales, mais elle va investir à son tour dans les «petits réacteurs».

Le Premier ministre belge Alexander De Croo a annoncé la poursuite des activités de deux réacteurs pendant dix ans.

Le Premier ministre belge Alexander De Croo a annoncé la poursuite des activités de deux réacteurs pendant dix ans. © PHOTO: AFP

Max Helleff

De notre correspondant Max HELLEFF (Bruxelles) - Les Verts belges passent un sale quart d'heure. L'attaque ne vient pas de leurs adversaires politiques traditionnels, mais de leur propre camp. Greenpeace dénonce «une catastrophe pour le climat, la sécurité et la facture d'énergie». InterEnvironnement désigne «une occasion manquée de réécrire notre avenir énergétique». Pour Stop nucléaire, «le gouvernement a choisi à la fois la peste et le choléra».

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Telles sont les réactions venues des associations environnementalistes au lendemain de l'accord énergétique dégagé par le gouvernement De Croo avec l'assentiment des écologistes. Dans la nuit de vendredi à samedi, elle a scellé la prolongation de l'activité de deux des sept réacteurs belges au-delà de 2025, et cela pour une durée de dix ans.

Depuis, les partis Ecolo (francophone) et Groen (flamand) n'ont de cesse de répéter que le maintien partiel du nucléaire n'est qu'un pas en arrière pour mieux sauter vers le 100% de renouvelable. Le recours aux centrales au gaz destiné à générer l'électricité manquante et le développement des énergies vertes d'ici 2035 sont censés permettre d'atteindre cet objectif.

Moins d'insécurité énergétique

L'instant n'en est pas moins politiquement dangereux pour les écologistes. «Bref, assène un chroniqueur de la chaîne publique francophone RTBF, le moment est douloureux pour les Verts qui doivent de surcroît aller à Canossa pour négocier avec Engie – l'opérateur des centrales. Négocier cela veut dire forcément accepter des compromis, que ce soit sur la rente nucléaire (l'impôt), les déchets (nucléaires), ou le démantèlement (des centrales), le dossier n'est pas clos. Le grand risque politique pour Ecolo, c'est que ce dossier traîne et que, d'ici les élections, ils ne puissent pas passer à autre chose.»

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La décision des Verts de se rallier au «plan B» - le maintien en activité de deux réacteurs – est pourtant marquée par le bon sens. Fermer toutes les centrales en 2025 et se mettre à la merci du gaz russe auraient condamné le pays à une insécurité énergétique permanente. Qui se serait payée cash de toute façon dans les urnes.

Mais il y a le reste. Les Verts ont aussi accepté de revoir la sacro-sainte loi de 2003 qui fixe la fin du nucléaire en 2025, «leur» victoire historique. Et puis, il y a ces cent millions d'euros que l'accord gouvernemental prévoit d'investir dans la recherche sur le nouveau nucléaire et le développement de petits réacteurs (SMR).

Un second parc éolien en mer

Cette technologie fleurit un peu partout sur la planète. Elle est notamment envisagée pour décarboner l'atmosphère dans des régions isolées du monde, qui recourent au charbon. Comme en Sibérie. Plus proche de nous, le président français Emmanuel Macron veut relancer l'énergie nucléaire dans l'Hexagone, via la construction de nouveaux EPR et le lancement futur d'un prototype de SMR.

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Autrement dit, si la Belgique s'engage à fermer en 2035 ses deux derniers réacteurs, rien ne dit qu'elle abandonnera le nucléaire définitivement. Des SMR pourraient s'ajouter à l'arsenal énergétique «défossilisé» qui doit mener à la décarbonation totale. Même s'il ne s'agit pour l'instant «que» de cent millions d'euros d'investissements.

Mais pour l'heure, le gouvernement De Croo promet d’augmenter fortement la capacité éolienne en mer du Nord pour atteindre à terme une production totale de 8 GW d'électricité. Un second parc baptisé « Princesse Elisabeth » en face de La Panne devrait s'ajouter dès 2027 à celui qui est déjà implanté face à Knokke. Grâce à lui, la puissance éolienne belge en mer devrait dans un premier temps totaliser les 5,7 GW.

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