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Un an sans gouvernement en Belgique, «c’est honteux !»

Les Belges jugent sévèrement l’absence de majorité au fédéral, une année après la chute du gouvernement Michel.

Un an après la démission du gouvernement Michel II, la Première ministre belge, Sophie Wilmes, dirige un État toujours profondément divisé.

Un an après la démission du gouvernement Michel II, la Première ministre belge, Sophie Wilmes, dirige un État toujours profondément divisé. © PHOTO: AFP

De notre correspondant, Max Hellef (Bruxelles) - C’était il y a un an. Le 18 décembre 2018, à défaut d’emporter le soutien de l’opposition, Charles Michel s’était rendu chez le roi pour lui faire part de la démission de son gouvernement. Le retrait de la N-VA de Bart De Wever à la suite de la ratification du pacte de Marrakech avait privé la «suédoise» de sa majorité au Parlement fédéral.

Plusieurs hypothèses ont circulé depuis. Bart De Wever a-t-il vraiment cru que le pacte de Marrakech interdirait aux nationalistes flamands de mener une politique migratoire stricte ? A-t-il plutôt jugé qu’il était temps de « planter » le gouvernement Michel pour radicaliser la N-VA alors que des législatives se profilaient au printemps ? Ou a-t-il créé de toutes pièces une crise politique pour couvrir le secrétaire d’Etat Theo Francken empêtré dans un scandale de visas humanitaires vendus sous le manteau ? Ces questions n’ont jamais connu de réponses.

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Un an plus tard, un gouvernement en affaires courantes tient toujours les commandes de la Belgique. Il ne dispose que d’une faible minorité à la Chambre (38 sièges sur 150) et a vu la plupart de ses cadors quitter le navire. Dans la mécanique institutionnelle globale du royaume, l’absence de gouvernement fédéral de « plein droit » est palliée par les Régions qui ont reçu des compétences de plus en plus importantes au fil des réformes de l’Etat - même si la Défense, les Affaires étrangères, la Migration ou encore la Sécu restent au fédéral.

Le Parlement fonctionne moyennant des majorités de rechange qui se nouent et se dénouent en fonction des dossiers. Mais le prochain budget annuel, lui, ne peut être voté en dépit d’un déficit de 11 milliards d’euros qui alarme la Commission européenne. L’absence de chaos apparent semble persuader le monde politique qu’il n’y a pas d’urgence à former un nouveau gouvernement. « C’est comme si le record des 541 jours établi en 2011 par les négociateurs du futur gouvernement Di Rupo avait repoussé très loin les limites. Un an sans gouvernement serait ainsi parfaitement acceptable », juge un analyste.

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Dans les têtes, le dommage est pourtant bien là. Selon un sondage relayé par plusieurs médias mardi, 80% des Belges estiment qu’un an sans gouvernement « c’est honteux ». Cette opinion ne doit pas à leur situation personnelle : elle tient du principe. Si les francophones se montrent malgré tout assez patients, les Flamands se disent en faveur d’un retour aux urnes faute d’un compromis dans les six mois.

On n’en est pas encore là. Pour l’heure, le nouveau duo d’informateurs royaux Bouchez-Coens s’active à son tour à dégager des pistes censées conduire à la formation du futur gouvernement fédéral. Sans surprise, une coalition « arc-en-ciel » sans la N-VA a la cote au sud du pays, mais passe mal en Flandre. En revanche, une coalition « bourguignonne », unissant la N-VA au Parti socialiste, récolte les faveurs des Flamands, mais est boudée par les francophones.

Les élections du 26 mai dernier ont plus que compliqué la donne. Les électeurs n’ont pas seulement puni les grands partis, ils ont aussi plébiscité les extrêmes – le Vlaams Belang au nord, les communistes du PTB au sud. Il en résulte un paysage politique morcelé où l’on se compte plus que jamais pour former une coalition. Si un référendum devait être organisé demain, 60% des Belges voteraient contre la scission du pays. En Flandre toutefois, ils ne sont plus que 50 % à assurer qu’ils voteraient contre la partition.

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