Un scénario à la grecque évoqué pour la Belgique
L'augmentation du coût des retraites et la hausse des taux d’intérêt mettent une pression maximale sur le conclave budgétaire.
En Belgique, la situation économique inquiète au plus haut point. © PHOTO: Shutterstock
De notre correspondant à Bruxelles, Max Helleff
Les comptes de la Belgique ne sont pas bons, mais alors pas bons du tout. Au point que la presse évoque le spectre d'un «scénario à la grecque», renvoyant à la crise qui, dès 2010, a secoué profondément l'Europe. Les chiffres donnent le tournis. Si rien n'est fait, le déficit annuel pourrait atteindre les 41 milliards d'euros en 2028, ce qui fait de la Belgique l'un des plus mauvais élèves de la classe européenne. Quant à la dette publique, elle est attendue à 108% du produit intérieur brut (PIB) cette année, et pourrait s'envoler bien plus haut encore.
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La Commission européenne, le FMI, l'OCDE, la Banque nationale, etc. : tous s'inquiètent de la cavalcade des chiffres belges et espèrent que le royaume sera capable de relever le défi que constitue l'apurement des comptes publics.
Cette situation s'explique d'abord par le ralentissement de l'économie enregistré durant le covid et les nombreuses aides qu'il a fallu prodiguer aux entreprises et à la population pour les maintenir à flot. En 2022, des fonds importants ont été également libérés par le gouvernement fédéral pour soutenir les Belges face à la montée du prix des énergies.
La conséquence, c'est qu'au lieu d’emprunter à 3%, on emprunte à 4, 5 ou 6%, faisant monter la charge d'intérêts encore plus parce que les marchés auront des doutes sur nous.
L'apaisement intervenu à ce niveau ces derniers mois a toutefois permis une amélioration de 6 milliards par rapport aux prévisions de déficit. «C'est une très bonne nouvelle. Le tarif des prix de l’énergie est à la baisse et donc, pour l'État, les dépenses seront moins importantes. Par exemple, en ce qui concerne le tarif social (qui profite aux moins nantis). Le tarif social et le tarif social élargi vont coûter moins cher à l’État. Et cela va donc diminuer notre déficit», s’est réjouie sur la chaîne publique RTBF la libérale Alexia Bertrand, secrétaire d'État en charge du Budget.
Même si le déficit est passé récemment de 5.9% du PIB à 4.8%, la Belgique demeure largement en dehors des clous européens. «Il reste beaucoup de travail et ce travail concerne surtout les dépenses liées au vieillissement. On parle des pensions. Il va falloir réformer pour faire en sorte que le système soit soutenable à l'avenir», poursuit Alexia Bertrand, rouvrant un dossier qui a pollué toute la législature.
Selon les experts, les dépenses sociales publiques annuelles représenteront 3,5% du PIB en 2050, «soit quelque 20 milliards en euros d'aujourd’hui, de plus qu'actuellement». La charge pour ceux qui seront dans le circuit du travail sera énorme. Un travailleur pourrait alors soutenir deux retraités.
La remontée des taux d’intérêt inquiète elle aussi. «La conséquence, c'est qu'au lieu d’emprunter à 3%, on emprunte à 4, 5 ou 6%, faisant monter la charge d'intérêts encore plus parce que les marchés auront des doutes sur nous», prévient Benoit Bayenet, le président du Conseil central de l’économie.
Le moment n'est pas anodin. Une fois ce conclave budgétaire terminé, les sept partis de la coalition au pouvoir et leurs homologues de l’opposition passeront en effet en mode élections. A un an du scrutin, ils ne pourront plus prendre le risque de se montrer impopulaires en décidant de mesures drastiques. C'est maintenant ou jamais...
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Une cinquantaine d’économistes ont rédigé une carte blanche parue dans le quotidien L'Echo où ils soulignent l’importance cruciale de ce conclave budgétaire. Les avis des experts quant aux voies de solution divergent sans surprise. Classiquement, on retrouve parmi eux les pro-austérité versus ceux qui prônent des stratégies de dépenses «intelligentes», susceptibles de ramener des recettes à l'Etat.