Comment Nico a fait sortir un village chinois de la pauvreté
Ce Luxembourgeois, originaire de Dudelange, vit désormais en Chine après être tombé sous le charme de l'Empire du milieu et avoir apporté sa précieuse aide afin de lutter contre la pauvreté dans un village reclus au fin fond des montagnes.
Nico René Hansen est resté trois ans au sein du village et est aujourd'hui considéré comme un membre à part entière de la communauté, © PHOTO: D.R.
Atypique, il n'y a guère d'autre mot pour décrire le parcours de Nico René Hansen. Ce Luxembourgeois de 62 ans s'est expatrié en Chine depuis maintenant plusieurs années. Un changement de vie radical mais salutaire pour le natif de Dudelange qui a trouvé en l'Empire du milieu une seconde terre d'accueil. Et l'ancien officier de police de la gendarmerie grand-ducale le lui a bien rendu en aidant un petit village installé dans les montagnes à se développer et à lutter contre la pauvreté.
Lire aussi :«Le Luxembourg prêt à travailler davantage avec la Chine»
La belle histoire commence en 2015, retraité de la police grand-ducale depuis quelques années, Nico René Hansen profite de son temps libre pour voyager et visiter d'autres contrées. Cette année-là, il se rend pour la première fois en Chine. «J'avais déjà beaucoup voyagé par le passé, en Europe ou encore en Afrique. Cela dit, à l'époque, ce n'était pas très commun de se rendre dans des États communistes», explique-t-il. Intrigué et intéressé par la culture, il visitera le pays à plusieurs reprises et se liera d'amitié avec plusieurs locaux, jusqu'à s'installer dans le pays. «Après avoir visité les plus grosses villes du pays, j'avais dans l'idée de partir à la découverte des montagnes.»
Nous sommes alors en 2018 lorsque le Luxembourgeois s'aventure dans la région montagneuse chinoise, située dans le sud du pays. Après plusieurs kilomètres à parcourir des chemins étroits, escarpés et parfois dangereux, Nico découvre face à lui un village pittoresque, comme figé dans le temps, surplombant les vertes montagnes et des vallées brumeuses. Le nom de cette localité? Le village de Zhadong, peuplé de quelques centaines d'âmes. Pour le Luxembourgeois, c'est le coup de foudre immédiat. «J'étais émerveillé par ces forêts de bambous qui s'étalaient à perte de vue, ces bananiers, ces petites maisons en terre. L'air était pur, on ne ressentait pas la moindre pollution», raconte-t-il.
Les étrangers ne s'aventurant pas souvent sur ces terres, pour ne pas dire jamais, l'ancien policier est accueilli comme une curiosité par les locaux. «Avec beaucoup de bienveillance et de respect cela dit», précise notre interlocuteur. Ce dernier est invité à découvrir le village niché dans la montagne. C'est là qu'il déchantera complètement. «Les habitants étaient habillés avec des loques, ce qu'ils portaient aux pieds ne pouvait pas être qualifié de chaussures, les maisons menaçaient de s'effondrer à la moindre intempérie. Sans compter le fait qu'il n'y avait évidemment pas d'électricité, il fallait aller chercher de l'eau dans un réservoir d'eau sale et il fallait aller faire ses besoins près de la porcherie», se remémore Nico René Hansen.
Ces gens n'avaient rien, mais ils étaient heureux. Ils survivaient des quelques plantations de fruits et de la récolte
Vu comme un simple touriste
Mais face à cette extrême pauvreté, une image restera gravée de la mémoire du Dudelangeois. «Ces gens n'avaient rien, mais ils étaient heureux. Ils survivaient des quelques plantations de fruits et de la récolte». Sur place, il rencontre un certain Xie Wanju, premier secrétaire de la branche du village de Zhadong du Parti communiste chinois. Ce dernier tente depuis longtemps de dynamiser le village, sans grand succès. Altruiste, Nico lui proposera son aide et lui fera part de ses idées pour améliorer le quotidien des habitants.
Lire aussi :Xi Jinping obtient un troisième sacre
Xie ne l'a, dans un premier temps, pas pris au sérieux. Comment un étranger, lunettes de soleil sur le bout du nez et appareil photo en main, ne parlant pas un mot de chinois pourrait améliorer la situation? Après avoir réfléchi, le responsable politique acceptera finalement que Nico René Hansen apporte son aide, bénévolement toutefois.
Le projet était lancé et sans le savoir, la vie du Luxembourgeois allait basculer à jamais. Celui-ci s'installe donc dans le village et dresse un premier état des lieux. «La question était de savoir par où commencer? Construire une école? Une maison médicale? Pour moi, il fallait surtout commencer par créer des routes pour relier plus facilement le village au reste de la civilisation.» C'est ainsi que les premiers travaux, financés par le gouvernement chinois et par du sponsoring dans les médias, ont pu débuter. «En parallèle de ces travaux, nous avons également entrepris de transformer des champs en cultures de fruits, le climat s'y prêtait parfaitement.»
Les mois passent et Zhadong se modernise à une vitesse folle grâce en grande partie au travail bénévole de Nico. «On a ainsi pu amener l'électricité jusqu'au village, mais aussi créer un réseau d'eau et les habitants peuvent même se rendre sur Internet. Grâce à la route que nous avons construite, les habitants ont pu rejoindre plus facilement la ville et vendre les nombreux fruits récoltés, rendant le village beaucoup plus prospère. Avec cet argent, les habitants ont acheté des briques pour construire des maisons plus solides. Dans la foulée, une fermette a également vu le jour, permettant de décupler les capacités d'élevage et de développer l'économie.»
«Travailler ensemble pour l'intérêt des habitants»
Au total, Nico René Hansen sera resté trois ans au sein du village. Considéré aujourd'hui comme un membre à part entière de la communauté, il jette un regard ému sur le travail accompli. «Ce projet a totalement changé la vision que j'avais de la vie. Je n'oublierai jamais cette bienveillance et cette gentillesse de la part de ces gens qui n'avaient rien. Même si je ne parlais pas le chinois et encore moins leur dialecte, on parvenait toujours à se comprendre car nous étions là pour travailler et avancer ensemble dans l'intérêt des habitants.»
Lire aussi :Poutine et Xi affichent leur solidarité face aux Occidentaux
Le Luxembourgeois vit aujourd'hui toujours en Chine, mais a quitté le village pour s'installer dans une ville de plus grande envergure située à une trentaine de kilomètres de Zhadong. «Je me suis marié et je retourne encore régulièrement au village pour donner un coup de main pour les travaux agricoles», dit-il. Et lorsqu'on lui demande si le Grand-Duché ne lui manque pas trop, celui-ci avoue que cela fait trois ans qu'il n'est plus retourné dans son pays d'origine. «Alors que j'avais l'habitude d'y retourner souvent. Mais la pandémie de covid-19 est passée par là. S'il existe des possibilités pour me rendre au Grand-Duché, il n'est pas certain que je puisse rentrer en Chine aussi facilement.»
L'avenir du village semble plus radieux que jamais
En effet, rappelons que l'Empire du milieu applique une stratégie «zero-Covid», n'hésitant pas à tester en masse et à confiner, encore aujourd'hui, des millions de personnes en cas de détection d'un cluster. «Ici, c'est une réalité. J'ai envie de voyager mais les restrictions sont encore très nombreuses ici», glisse-t-il. Résultat, le chômage est en très forte hausse, surtout parmi la jeunesse chinoise. «Dès lors, une stratégie de revitalisation est actuellement en place afin de motiver les jeunes à s'installer et travailler dans les régions plus reculées, dont Zhadong. L'avenir du village semble donc plus radieux que jamais.»
2022 marque le 50e anniversaire des relations diplomatiques entre le Luxembourg et la Chine. © PHOTO: D.R.