Documenter les crimes de guerre avec des scanners 3D
L'aide du Luxembourg à l'Ukraine est multiple. Les deux parties ont expliqué ces jours-ci pourquoi la livraison de 30 scanners 3D est si importante.
Les scanners ont été chargés jeudi dernier. © PHOTO: Guy Jallay
Centre militaire d'Härebierg, jeudi midi. Le chauffeur du chariot élévateur charge habilement les palettes de transport de la précieuse cargaison dans le camion, sous le regard attentif du ministre de la Défense François Bausch (Déi Gréng), du chef de l'armée, le général Steve Thull, et de deux invités ukrainiens de haut rang : Natalia Anoshyna, chargée d'affaires à l'ambassade d'Ukraine à Bruxelles, et Nataliia Nestor.
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Il est indispensable de faire le point sur ce qui s'est passé et de fournir des preuves des atrocités russes.
Nataliia Nestor est directrice adjointe du «Research Institute of Forensic Science» à Kiev et elle est particulièrement heureuse de la précieuse cargaison qui est arrivée en Ukraine ce week-end. Il s'agit de 30 scanners 3D qui permettront de documenter les événements et les crimes de guerre dans sa patrie meurtrie. «Il est indispensable de traiter ce qui s'est passé et de fournir des preuves des atrocités russes», souligne Nataliia Nestor. «On le doit aux victimes.»
Au centre militaire du Härebierg, le général Thull, le ministre Bausch et la représentante de l'ambassade (de g. à dr.) ont assisté à une démonstration de l'utilisation du scanner 3D. © PHOTO: Guy Jallay
Pour mener à bien cette tâche, les autorités locales ont besoin du soutien matériel de leurs partenaires occidentaux. Les scanners tridimensionnels constituent un tel soutien. Grâce à leur programmation, ils sont faciles à utiliser et permettent de scanner numériquement une surface en peu de temps et d'enregistrer ce qui a été saisi pour des enquêtes ultérieures. En effet, l'un des problèmes est que les scènes de crime sont contaminées et que les traces sont effacées lorsque l'enregistrement des preuves se fait attendre trop longtemps.
La signature luxembourgeoise s'appelle Artec 3D
La technologie 3D permet à la fois de documenter les restes humains et de conserver des preuves des dommages causés aux infrastructures, qui ont récemment augmenté violemment en raison de la rage destructrice indiscriminée des forces armées russes. «Les scanners nous donnent une possibilité supplémentaire de demander des comptes à ceux qui sont responsables des crimes qu'ils commettent en Ukraine», espère la représentante de l'ambassade.
La technologie 3D permet à la fois de documenter les restes humains et de conserver des preuves des dommages subis par l'infrastructure. © PHOTO: Guy Jallay
Pour le ministre de la Défense, il s'agit de «rendre justice»: il ne faut pas fermer les yeux sur les crimes de guerre commis par l'armée russe, c'est une certitude pour François Bausch. Il parle d'un «projet utile», qui prend pour lui toute son importance du fait que les scanners sont développés et mis à disposition par une entreprise luxembourgeoise : Artec 3D.
Fondée en 2007 par Artjom Yuchin, Sergej Suchowej et Gleb Gusew - le trio est né en Russie et possède désormais la nationalité luxembourgeoise - l'entreprise a son siège social au Luxembourg depuis 2010 et fait partie des principaux fournisseurs de scanners 3D avec environ 150 partenaires de vente dans 60 pays.
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Les appareils sont utilisés entre autres par les autorités policières et judiciaires, mais aussi par de grandes entreprises comme ArcelorMittal ou Google. Après le début de la guerre, l'entreprise avait déjà fait don à l'Ukraine d'un scanner pour la conservation numérique et la reconstruction ultérieure de biens culturels.
Au vu des derniers développements dans la guerre en Ukraine, il est également nécessaire, selon le ministre Bausch, de continuer à fournir des armes à Kiev. Le conflit se trouve dans une phase décisive et il s'agit de permettre aux forces armées ukrainiennes d'agir en position de force.
Armes, scanners et bientôt des bus
L'aide militaire luxembourgeoise s'élèvera cette année à environ 74 millions d'euros. En juillet déjà, le ministre avait donné des détails sur les livraisons du Luxembourg dans une réponse à une question parlementaire du député ADR Fernand Kartheiser. Ainsi, les forces armées ukrainiennes ont reçu jusqu'alors entre autres 102 armes antichars, 12.500 munitions antichars, sept véhicules tout-terrain de type Jeep Wrangler, 5.000 casques et gilets de protection chacun ainsi que 20.000 munitions pour mitrailleuses.
Le Luxembourg a été à nos côtés dès le début.
Du côté ukrainien, on ne tarit donc pas d'éloges jeudi sur l'aide apportée par le Grand-Duché. «Le Luxembourg a été à nos côtés dès le début», se souvient Natalia Anoshyna.
Un autre projet montre que l'aide du Luxembourg est en outre diversifiée : des bus du réseau RGTR, qui ne sont pas utilisés actuellement, seront prochainement livrés à l'Ukraine. Dans la quasi-totalité du pays, l'infrastructure de transport et le parc de véhicules sont endommagés par les bombardements incessants et l'Ukraine a besoin de matériel de remplacement pour assurer au moins la moitié du service.
Cet article a été publié pour la première fois sur wort.lu/de