«Engagez et formez des apprentis !»
Tel est le message lancé par la Chambre des Métiers et celle des Salariés. Un cri d'alerte même, alors que la crise aurait tendance à freiner les entreprises à ouvrir leurs portes aux demandeurs de formation professionnelle.
Moins de candidats à l'apprentissage, mais surtout moins de places offertes par les entreprises. Voilà qui est préoccupant pour l'emploi comme pour la transmission des savoirs professionnels. © PHOTO: Shutterstock
Sale temps pour les entreprises en ce moment. Et si le ciel s'assombrit côté emplois, il devient carrément menaçant côté apprentissage. Et Tom Oberweiss peut en témoigner. Dans un récent sondage effectué par la Chambre des Métiers qu'il préside, 54% des entreprises jusque-là formatrices ont indiqué qu'elles recruteraient moins d'apprentis dans les mois à venir que par le passé. Même retenue pour celles non formatrices, 49% stipulant clairement qu'elles ne prendraient pas de jeunes sous leur aile. «Une tendance particulièrement inquiétante», commente le "patron" de la Chambre des Métiers.
Et c'est la même crainte qui prévaut du côté de la Chambre des Salariés et de sa présidente. Pour Nora Back, «il y aura clairement moins de places proposées à la rentrée, il faut donc réagir d'urgence si l'on ne veut pas sacrifier une génération». Conjointement, les deux entités professionnelles ont donc décidé de mettre au point une stratégie sur laquelle pourrait s'appuyer le gouvernement pour sauver cette voie de la formation professionnelle. Voie qui, bon an mal an, bénéficie à 4.200 jeunes et adultes, dont 1.670 pour le seul secteur de l'artisanat.
Des idées neuves
Si ces derniers mois, l'apprentissage a pu bénéficier de protections (chômage partiel, période prolongée pour la conclusion des contrats, flexibilité en matière d'évaluation), il lui faut maintenant lui offrir des moyens de relance. Cela pourra passer non seulement par un effort de promotion des nombreux métiers ouverts à l'apprentissage, mais aussi l'augmentation du soutien financier de l'Etat. Un coup de pouce demandé dans les aides aux entreprises (afin de les encourager à recruter des apprentis), dans une possible prime au mérite pour les apprentis, dans la prise en charge -même temporaire- de l'indemnité d'apprentissage ou encore dans la création d'un centre de formalités.
Un Ipad par apprenti
Parmi les suggestions adressées aux ministères du Travail et de l'Education pour booster l'apprentissage, les Chambres des Salariés et des Métiers insistent sur l'importance prise par la digitalisation du milieu du travail et de la formation. Aussi demandent-elles que apprentis comme tuteurs puissent bénéficier d'un Ipad personnel. A l'image de ce qui se fait dans un peu moins d'un tiers des lycées du pays déjà.
Voilà une des idées neuves, présentées ce jeudi par les deux Chambres. «Cet organisme viendrait épauler les entreprises et les demandeurs de formation professionnelle dans la mise en relation ou lors de la conclusion d'un contrat. Il faut faciliter le parcours des deux côtés. Objectif : 0 formalité, plus de paperasse», envisage Carlo Frising, directeur-adjoint de la Chambre des salariés. Autre nouveauté envisageable : la création d'un Fonds pour la promotion de l'apprentissage (financé comme le Fonds pour l'emploi).
Car, plus que jamais, l'apprentissage a aussi besoin de soigner son image. Car si les difficultés économiques du moment rendent les sociétés frileuses à recruter, l'attrait de cette filière semble s'amenuiser avec le temps. Et le confinement n'a visiblement pas amélioré les choses. Ainsi, les différents acteurs constatent à regret la faiblesse du nombre de demandeurs, actuellement. En forte chute à comparer à l'an dernier. «Il faut adresser un message d'espoir à ceux qui hésitent à se lancer dans cette voie», encourage Carlo Frising.
Pourtant les opportunités d'embauche existent; pourtant des secteurs restent à la recherche de talents à former; pourtant de nouvelles formations et de nouveaux diplômes sont créés. Il faudrait d'ailleurs en prévoir d'autres, notent Chambres des Salariés et des Métiers. Comme par exemple dans le secteur de la Santé, ou encore les métiers d'agent de surveillance ou de concierge. Sachant que l'apprentissage est aussi envisageable pour des jobs aussi "pointus" que dessinateur en bâtiment ou assistant en pharmacie.
Reste maintenant à savoir si Dan Kersch (LSAP) et Claude Meisch (DP) se montreront ouverts à ces propositions. En tout cas, la liste a bien été adressée aux ministres du Travail et de l'Education.