Felix Braz plaide pour une loi sur la parentalité «moderne»
Réforme du système judiciaire, changements constitutionnels, nouvelles lois sur la protection des mineurs ou sur la parentalité : ce ne sont pas les thèmes qui manquent pour l'interview du ministre de la Justice.
Felix Braz voulait étudier le droit. Mais il a ensuite abandonné ses études «temporairement» pour présenter la première émission de radio en portugais. © PHOTO: Lex Kleren
(PJ avec Danielle SCHUMACHER) «J'ai hâte d'entreprendre de nouvelles tâches.» Désolé pour ceux qui pensaient que Felix Bras (Déi Gréng) s’ennuyait dans ses fonctions de ministre de la Justice. Il n’en est rien. Même les récentes critiques lors du débat sur la protection des données n’ont pas affecté sa détermination à continuer dans son rôle pour les cinq ans à venir.
«La protection des données n'est pas une réforme fiscale qui entre en vigueur un jour donné. Sa mise en œuvre est un processus», commente le ministre. Et d’inviter majorité comme opposition à ne pas s’impatienter : «Cela prendra des années. Cela s'applique tout de même à la police et à la justice mais aussi à toutes les autres bases de données de l'État ou des municipalités».
Le débat sur la protection des données, à ses yeux, est loin d’être clos. «Dans les semaines à venir, nous devrons discuter objectivement de la question de savoir s'il y a encore place à l'amélioration dans la mise en œuvre. Il n'y a aucune raison pour laquelle nous ne devrions pas amender le texte si nécessaire.»
S’il est ouvert à la discussion, Felix Braz rappelle toutefois que la loi sur la protection des données est basée sur un paquet s'appliquant à l'ensemble des 28 États membres de l'UE. «Notre base juridique n'est donc pas plus incomplète que les autres».
Optimisme affiché
En prenant son poste, Felix Braz n’avait pas caché la volonté gouvernementale d’engager une réforme majeure du système judiciaire. Il s'agit avant tout de créer un Conseil national de la magistrature. «L'objectif est de renforcer l'indépendance du pouvoir judiciaire, en particulier vis-à-vis du pouvoir exécutif». Dans la pratique, l'indépendance fonctionne depuis longtemps, «mais elle n'est pas suffisamment ancrée dans la Constitution actuelle».
D’où son insistance à ce que la réforme constitutionnelle en discussion actuellement soit menée à bien dans les meilleurs délais. «Mais en tant que ministre, je n'ai aucune influence sur cela, la Constitution relève de la compétence du Parlement».
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Cependant, le ministre de la Justice reconnaît combien il admet difficilement la position du CSV. L'opposition subordonne en effet son approbation de la future Constitution à un référendum sur des questions spécifiques. «L'été dernier, il y avait encore un large consensus sur le contenu de la réforme constitutionnelle, mais aussi sur la participation civique. Mais je veux rester optimiste.»
Protéger les parentalités
Concernant la réforme de la loi sur la protection des mineurs, Felix Braz se dit prêt à reprendre ses travaux. Il avait déjà soumis une première proposition en 2013 ; texte qui avait fait l’objet de nombreux reproches.
Désormais, selon lui, la prochaine refonte des textes devrait se « concentrer sur la justice pour mineurs sur la base de la Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant ». Aucune date n'est avancée pour la réalisation de cette refonte.
Revenir sur les distinctions
Mais sur le bureau du ministre, le dossier sur la loi de l'ascendance figure également sur le haut de la pile. Les points centraux concernent la parentalité et la question de savoir comment elle est légalement protégée. «Au vu des progrès de la médecine d'aujourd'hui, la vie peut se dérouler de nombreuses façons, par exemple par l'insémination artificielle ou la maternité de substitution. Le droit de filiation moderne doit apporter une réponse à toutes ces questions.»
Le prochain texte devra donc tenir compte des différentes formes de parentalité. «Aujourd'hui encore, nous faisons la distinction entre les enfants légitimes et illégitimes. De telles différences ne doivent plus exister. Nous ne devons cependant pas faire de distinction entre les enfants de parents biologiques et ceux qui ont recours à une forme quelconque d'assistance médicale», indique le ministre.
Les futurs projets de loi devront, par exemple, clarifier ce qu'est le droit successoral lorsque des enfants sont conçus, par exemple après la mort de leur père, au moyen d'un don de sperme gelé, etc.
Le ministre de la Justice ici dans la grande salle de la Villa Louvigny. Le même bâtiment où se trouve actuellement le Ministère de la Santé était le siège de RTL. C'est là que Félix Braz a lancé la première émission de radio portugaise au Luxembourg. © PHOTO: Guy Wolff
Les futurs projets de loi devront, par exemple, clarifier ce qu'est le droit successoral lorsque des enfants sont conçus, par exemple après la mort de leur père, au moyen d'un don de sperme gelé, etc.
Pour cet été, Felix Braz a aussi prévu la lecture du rapport du Conseil d'Etat sur la réforme du système notarial. Car l'accès à l'étude du notaire reste aujourd'hui trop limité. Cela alors que la Cour de justice des Communautés européennes a décidé que les États membres de l'UE devaient ouvrir leurs bureaux notariaux aux notaires d'autres pays de l'Union. «Les objections du Conseil d'État nous aideront donc certainement à simplifier le texte.»
La Cité judiciaire déborde
La Justice luxembourgeoise dispose-t-elle des moyens humains nécessaires à son bon fonctionnement? Pour le ministre de tutelle, la réponse tient en une phrase: «Nous avons fait d'énormes progrès au cours des cinq dernières années dans l'occupation des postes dans la magistrature». Un objectif souvent freiné au vu des difficultés à trouver des candidats. «Nous avons donc adapté les procédures de recrutement. Nous avons construit des ponts pour faciliter le passage des avocats à la magistrature», indique Felix Braz. «En 2013, il y avait 213 postes dans la magistrature, au cours des cinq dernières années, plus de 70 ont été ajoutés.» La magistrature a ainsi augmenté d'un tiers en cinq ans seulement. Mais la médaille a son revers, et le ministre se voit ainsi reconnaître que, désormais, «la Cité judiciaire déborde à vue d'œil».