L'aide aux devoirs de Claude Meisch fortement critiquée
L'aide aux devoirs promise ne devient qu'une surveillance des devoirs. L'opposition est déçue, le LSAP aussi.
Une surveillance des devoirs n'aide pas les enfants qui ont des difficultés d'apprentissage. Ils ont plutôt besoin d'aide pour faire leurs devoirs, les politiciens de l'opposition, mais aussi le LSAP, en sont convaincus. © PHOTO: Chris Karaba
En fait, le ministre de l'Education Claude Meisch (DP) voulait élaborer avec les écoles un concept d'aide aux devoirs qui serait mis en œuvre dans les écoles par des professionnels qualifiés, dont des enseignants, qui le feraient sur une base volontaire. L'idée est d'offrir de meilleures chances d'éducation aux enfants qui n'ont pas de soutien à la maison ou qui ne bénéficient pas de bonnes conditions d'apprentissage. C'est ce que prévoit le programme gouvernemental.
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Mais le Syndicat national des enseignants (SNE), qui entretient des échanges réguliers avec le ministre et a déjà signé de nombreux accords avec le ministère, s'y oppose. L'aide aux devoirs ne fait pas partie des missions de l'école.
Une surveillance plutôt qu'une aide
L'aide aux devoirs n'aura donc pas lieu. Pourtant, le ministre Meisch a annoncé une telle aide lors d'une conférence de presse le 7 juillet. En réalité, il ne s'agit pas d'une aide aux devoirs, mais d'une surveillance des devoirs, comme cela existe déjà depuis des années.
On peut alors se demander pourquoi le ministère n'a pas veillé, durant toutes ces années, à ce que toutes les structures proposent l'aide aux devoirs.
Depuis fin 2013, la surveillance des devoirs fait partie des missions que les maisons relais doivent remplir dans le cadre de leur agrément. Or, toutes les maisons relais ne proposent pas cette surveillance. «On peut donc se demander pourquoi le ministère n'a pas veillé, durant toutes ces années, à ce que toutes les structures proposent la surveillance des devoirs», déclare la cocheffe de groupe CSV Martine Hansen, qui accuse le ministre Meisch de faire mousser cette affaire.
Ce qui la dérange le plus, c'est que les enfants ne sont pas aidés. «Ils peuvent seulement poser des questions sur l'énoncé du devoir, mais pas sur le contenu, ni sur le fait de savoir si le devoir est juste ou faux». Elle peut comprendre que les écoles ne considèrent pas l'aide aux devoirs comme leur mission. «Mais alors, le ministre doit faire en sorte que les maisons relais puissent proposer cette aide», dit Martine Hansen.
Elle reproche en outre au ministre de tirer une fois de plus à la courte paille, sans préparation. «Il annonce de manière totalement improvisée des choses qui ne correspondent pas à ce qui a été promis», résume-t-elle.
«L'aide aux devoirs est plus qu'une surveillance des devoirs», affirme également Sven Clement (Pirate). Selon lui, cette surveillance n'aide personne. «Nous devrions veiller à ce que les enfants qui n'ont pas de soutien à la maison soient aidés. Mais pour cela, il faut un vrai concept et des professionnels formés», dit-il.
Une goutte d'eau dans l'océan
Francine Closener (LSAP) qualifie la mesure de «bonne», mais d'insuffisante : «Ce n'est pas ainsi que nous combattrons les inégalités en matière d'éducation.» Elle est également déçue de la manière dont Claude Meisch a procédé : «La mesure n'a été présentée ni au conseil de gouvernement ni à la commission parlementaire compétente. Nous avons tout appris par la presse. L'affaire est décidée et nous n'avons, en tant que parlementaires, aucune possibilité de participer à son élaboration», déclare-t-elle.
Les parents pourraient s'attendre à ce que les problèmes scolaires soient traités, si on leur vend maintenant des devoirs surveillés comme de l'aide aux devoirs.
Et que disent les maisons relais ? «On vend ici comme une nouveauté quelque chose qui est déjà proposé dans la plupart des communes», dit Claude Gleis, responsable des maisons relais à Hesperange. Il craint que l'annonce ne crée chez les parents des attentes auxquelles les structures ne pourront pas répondre. «Les parents pourraient s'attendre à ce que les problèmes scolaires soient traités, si on leur vend maintenant des devoirs surveillés comme de l'aide aux devoirs», dit-il.
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À Hesperange, 85% des élèves du primaire sont inscrits dans une maison relais. Les devoirs y sont également faits. Dans la pratique, dit Claude Gleis, on aide aussi les enfants de manière ponctuelle, surtout ceux qui ont des problèmes scolaires. «Nous avons toujours fait plus que ce qui était exigé par la loi. Il ne voit aucune raison de ne plus procéder ainsi à l'avenir.»
La nouveauté, c'est que les structures doivent mentionner une personne de référence pour les devoirs surveillés et que les tuteurs doivent avoir un diplôme d'enseignement secondaire. Claude Gleis ne voit pas de valeur ajoutée à exiger un diplôme pour surveiller les devoirs. «Nous n'avons de toute façon pas fait appel à des personnes peu qualifiées sans connaissances linguistiques», dit-il. Il estime également que tous ceux qui n'ont pas de diplôme de fin d'études secondaires et à qui l'on dit qu'ils ne peuvent plus faire de surveillance se sentent lésés.
La «E-brochure»
Une autre nouveauté est le carnet de devoirs électronique (E-Bichelchen), auquel les enseignants, les éducateurs et les parents ont accès. L'idée est la suivante : les enseignants inscrivent les devoirs, les parents ou les maisons relais peuvent les consulter, cliquer sur les devoirs qui ont été faits et y inscrire des remarques.
Cela semble être une bonne idée, mais cela prend du temps et n'apporte pas forcément une grande valeur ajoutée. «Il n'est pas prévu que nous ayons plus d'heures à disposition», explique Claude Gleis. «On nous donne plus de tâches, mais pas plus de personnel».
La demande contre l'offre
Selon le ministre Claude Meisch, l'offre s'applique également aux élèves qui ne sont pas inscrits dans les maisons relais. Mais Claude Gleis affirme que «les structures ne sont pas habilitées à prendre en charge des enfants qui ne sont pas inscrits». Une simple inscription pour les devoirs est possible, «mais seulement en fonction des disponibilités», précise-t-il.
Ce qui nous amène à un autre problème : la capacité.
Mais la loi sur la gratuité de la garde d'enfants n'est pas liée à un droit à une place, pas plus qu'il n'existe un droit à une place pour les devoirs surveillés.
Aujourd'hui déjà, il existe des listes d'attente à de nombreux endroits, notamment pour certaines périodes. Et la demande pourrait augmenter à l'automne, car c'est à ce moment-là que débute l'accueil gratuit à temps plein. Mais la loi sur la gratuité de l'accueil des enfants n'est pas liée à un droit à une place, tout comme il n'existe pas de droit à une place pour les devoirs surveillés. Une partie des élèves ne pourra pas profiter des offres gratuites. L'égalité des chances n'existe donc que dans la mesure où des places sont disponibles.
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On ne sait d'ailleurs pas encore comment les surveillants vont s'organiser. On ne peut pas surveiller les devoirs et faire en parallèle des activités avec les enfants.
Garde gratuite à temps plein
Il reste également à voir si la gratuité de la garde d'enfants à partir de l'automne entraînera des changements de comportement chez les parents. Actuellement, ils doivent payer s'ils n'annulent pas à temps l'inscription de leurs enfants. Cela ne dérange pas beaucoup de parents, dit Claude Gleis. Mais la règle selon laquelle les parents doivent payer s'ils n'annulent pas l'inscription de leurs enfants à temps est supprimée. Cela pourrait devenir un problème. «Si 1.000 enfants sont inscrits et que seuls 800 viennent, nous jetons 200 déjeuners et avons plus de personnel en service que nécessaire. C'est déjà un problème aujourd'hui et cela ne s'améliorera pas si tout est gratuit», explique encore Claude Gleis.
Le seul moyen d'action de l'établissement : bloquer pendant un certain temps les enfants qui n'ont pas été désinscrits à plusieurs reprises.
Cet article a été publié pour la première fois sur wort.lu/de