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L'immobilier de bureau contraint de se réinventer

Si le confinement a obligé toutes les entreprises du pays à adopter le travail à distance, le retour en entreprise s'amorce peu à peu. Avec de nouvelles habitudes qui vont impacter, à moyen terme, les stratégies des entreprises en matière d'organisation du lieu de travail.

La généralisation attendue du télétravail d'au moins un jour par semaine devrait aboutir à une rationalisation des 4,2 millions de m2 de bureau actuellement disponibles au Luxembourg.

La généralisation attendue du télétravail d'au moins un jour par semaine devrait aboutir à une rationalisation des 4,2 millions de m2 de bureau actuellement disponibles au Luxembourg. © PHOTO: Anouk Antony/archives

Restés vides en grande partie depuis le mois de mars, les 4,2 millions de m2 d'espace de bureau du Grand-Duché peinent à retrouver leur vie d'avant la pandémie. Délaissée au profit du télétravail ou de nouvelles formes d'organisation afin de respecter les consignes sanitaires, l'incarnation physique des entreprises va devoir prendre d'autres visages. Ce qui aura pour conséquence de faire évoluer un marché de l'immobilier de bureau, en croissance constante au cours de la décennie écoulée.

Face à la généralisation à venir du travail à distance pour au moins un jour par semaine, l'avenir devrait être placé sous le signe d'«une rationalisation des biens immobiliers», à en croire Julien Pillot, head of office-agency chez Inowai. Autrement dit, une approche dans laquelle «rares seront les entreprises à la recherche de bureaux 'additionnels', alors que les sociétés en fin de bail pourront être intéressées par des biens plus petits et plus sécurisés», estime le spécialiste qui juge que «le phénomène de la sous-location devrait, lui aussi, prendre son essor».

Dans ce contexte, les surfaces comprises entre 800 et 1.000 m2 devraient être les plus demandées, car permettant d'accueillir entre 40 et 50 personnes, et donc permettre un roulement dans les équipes. Cette évolution de la demande devrait non seulement aboutir à de nouvelles conditions locatives, potentiellement plus favorables qu'actuellement, mais aussi à des transformations dans l'approche même de la notion d'entreprise.

Pour certains salariés, la vie de bureau pourrait donc, à l'avenir, «ressembler à une toile d'araignée avec son siège historique réaménagé et restructuré mais aussi avec son réseau d'espaces satellites installés aux frontières», juge Lotfi Behlouli, director office agency chez JLL. Une organisation décentralisée qu'expérimentent déjà certains Big Four avec leurs bureaux à Belval ou dans des centres de télétravail, comme celui de Yutz, côté français.

Des essais rendus possibles par «les réflexions qui ont été menées par ces acteurs avant l'arrivée de la pandémie et qui se trouvaient donc dans les tuyaux», rappelle William Moulin, directeur advisory et transaction services chez CBRE qui juge que «beaucoup d'acteurs cherchent à trouver des solutions, qu'elles soient temporaires ou un peu plus pérennes». Mais ce qui est envisageable pour PwC ou Deloitte et leurs milliers de salariés respectifs ne le sera vraisemblablement pas pour des entreprises plus modestes.

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Raison pour laquelle la notion de sur-mesure devrait rester la norme pour les acteurs du secteur. A la nuance près que les biens recherchés, quelle que soit leur taille, devront être dotés de nouveaux équipements. Qu'il s'agisse de cabines d'ascenseurs sans contact, de lumières UV permettant de désinfecter certains espaces jugés sensibles ou bien encore des systèmes d'aération capables d'assainir l'air ambiant. De nouveaux appareils qui devraient donc être installés dans des bâtiments récents, «sans surcoût spécifique», estiment les experts immobiliers qui parlent d'une «répartition différente des coûts pour répondre à la demande».

Quant aux immeubles plus anciens, la transition vers ces nouveaux standards devrait ne pas être systématique, notamment si ces derniers se situent dans des zones mixtes où cohabitent résidentiel et bureau. «C'est la raison pour laquelle des réflexions pourraient être menées pour réaliser des reconversions de ces espaces», estime Julien Pillot qui juge que cette option permettrait d'«apporter une réponse à une double problématique: celle du manque de logements et celle d'un éventuel excédent d'offres de bureaux dans certains quartiers».

Pour mémoire, trois quarts des espaces de bureau au Grand-Duché sont concentrés à Luxembourg-Ville, répartis principalement entre le Kirchberg, le centre-ville, la Cloche d'Or et le quartier de la Gare. Le quart restant se trouvant dispersé entre la périphérie de la capitale - aéroport, Strassen ou Leudelange - et des sites plus excentrés tels que Belval, Munsbach ou bien encore Contern.

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