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«La fiscalité des monoparentaux mène à la paupérisation»

Au Luxembourg, plus de 45% des personnes isolées avec un ou plusieurs enfants à charge vivent en dessous du seuil de pauvreté, selon le Statec. Si certains dénoncent une fiscalité «injuste», d'autres voix s'élèvent pour demander les mêmes droits légaux que les couples.

Au Luxembourg, plus de 82% des familles monoparentales sont composées d'une mère et de ses enfants.

Au Luxembourg, plus de 82% des familles monoparentales sont composées d'une mère et de ses enfants. © PHOTO: Shutterstock

Didier Hiegel

Bien que possédant un des PIB les plus importants au niveau mondial, le Luxembourg n'échappe pas à la pauvreté. Priorité de la nouvelle Commission européenne qui entend promouvoir notamment l'inclusion sociale, cette question touche particulièrement les personnes seules avec un ou plusieurs enfants à charge.

Selon les derniers chiffres du Statec, les familles monoparentales représentaient 5,1% de l'ensemble de la population en 2014, soit plus de 28.000 personnes. Une frange de la population soumise à une fiscalité estimée «injuste» par le collectif monoparental puisque les familles isolées seraient défavorisées par rapport à un couple. Ce phénomène mènerait à la paupérisation.

Une affirmation corroborée par Eurostat, pour l'année 2017, qui montre qu'une famille isolée avec enfant(s) sur deux (54,2%) avaient des difficultés à joindre les deux bouts. Contre 30% pour le reste des familles. D'autre part, et toujours selon l'office statistique européen, 47,2% des familles monoparentales étaient dans l'incapacité de faire face à des dépenses imprévues. Alors que la moyenne nationale est fixée à moins de 25%.

Conséquence de ces difficultés financières, il apparaît que la moitié des personnes isolées avec enfant(s) à charge sont exposées au risque de pauvreté. Le Luxembourg fait ainsi partie des mauvais élèves de l'UE en comparaison avec ses voisins. Cette question sur la pauvreté et le risque de pauvreté fera d'ailleurs l'objet d'une interpellation du député Paul Galles (CSV) à la Chambre, ce mardi.

«Les transferts sociaux ne protègent pas suffisamment les familles monoparentales du risque de pauvreté», souligne Jean Heuschling, le porte-parole du Collectif monoparental, qui a fait de la «justice fiscale», son cheval de bataille. «C'est une situation qui touche de plus en plus de monde», indique-t-il encore en référence au nombre croissant de divorces au Grand-Duché au cours des 20 dernières années.

Le collectif monoparental dispose de l'appui de tous les partis, selon lui, et ne désespère pas de voir les choses évoluer prochainement. «Le gouvernement veut abolir les classes d'impôt, nous avons donc bon espoir. Peut-être d'ici à la fin de l'année...» En effet, fin novembre, Pierre Gramegna (DP), le ministre des Finances, avait confirmé l'intention du gouvernement d'adopter un barème unique d'imposition pour tous les contribuables quelle que soit leur situation familiale.

Si les familles monoparentales revendiquent l'équité fiscale, certains plaident pour que leur spécificité soit mieux reconnue. C'est notamment le cas de Nassima Ouzren. Cette jeune mère de famille a déposé une pétition, «pour que les personnes qui élèvent leur(s) enfant(s) seules bénéficient de plus de jours "enfant malade" couverts par la CNS». En date de ce lundi, cette pétition n'a recueilli que 449 signatures, bien loin des 4.500 nécessaires pour faire l'objet d'un débat public.

«Je suis soutenue, mais les gens ont du mal à se mobiliser alors que nous sommes potentiellement nombreux à gérer tout tout seul», estime-t-elle en indiquant qu'il serait «juste que les familles monoparentales disposent du même nombre de jours de congés alloués aux couples». A savoir 24 pour les enfants entre la naissance et quatre ans, 36 jours de quatre à 13 ans, et dix jours entre 13 et 18 ans. La pétition de Nassima Ouzren prendra fin le 20 février.

Pour rappel, en 2014, lors des dernières références du Statec, les ménages monoparentaux représentaient 3,2% de l'ensemble des ménages, 9% des ménages avec enfants. D'autre part, la monoparentalité reste un phénomène largement féminin puisque la personne de référence dans 82,7% des ménages monoparentaux était une femme.

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