La hausse du revenu de base fait encore tousser
Les chambres de Commerce et des Métiers ne décolèrent pas devant la volonté du gouvernement d'augmenter le salaire social minimum au 1er janvier prochain.
Après une année plus que morose, les restaurateurs (entre autres professions) pourront-ils supporter la hausse du salaire de nombreux de leurs employés? © PHOTO: AFP
Décidément, ça ne passe pas. Déjà le 20 novembre dernier, à peine Xavier Bettel venait-il d'annoncer l'augmentation de 2,8% du salaire social minimum au 1er janvier 2021 que le patronat grondait. Par la voix de l'UEL le jour même. Via la Confédération des classes moyennes le lendemain. Et alors que le ministre Lex Delles (DP) vient tout juste de défendre le projet de loi en commission, la contestation reprend ce jeudi. Les Chambres de commerce et des métiers demandant à nouveau le retrait de la mesure (au mieux), une compensation plus conséquente et généralisée à toutes les entreprises impactées par ce choix unilatéral (au moins).
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Et si la Chambre de commerce et la Chambre des métiers «critiquent fortement» la décision gouvernementale, c'est d'abord parce que, selon elles, elles tombent au pire moment. L'année 2020 a été compliquée à gérer, en raison de la crise covid, et 2021 s'annonce bien incertaine. Aussi les entrepreneurs, indépendants et artisans envisagent mal de pouvoir taper dans leur trésorerie pour assurer cette hausse des revenus.
Certes, cette hausse exigée par l'Etat ne s'élèverait «que» d'environ 70 euros mensuels sur les fiches de paie, mais l'augmentation se traduirait aussi par des augmentations en cascade sur les salaires proches du montant minimum et des cotisations sociales liées. Soit un coût total estimé à une soixantaine de millions d'euros. Insupportable, indiquent donc les deux instances dans une prise de position commune.
+ 24% en dix ans
C'est l'augmentation cumulée totale du salaire social minimum au Grand-Duché depuis juillet 2010 (la dernière ayant eu lieu au 1er janvier 2020). Soit due à la mise en oeuvre des hausses automatiques liées à l'index, soit en raison du «rattrapage» désormais souhaité par le gouvernement.
Si les deux Chambres invitent à nouveau le gouvernement à faire machine arrière, elles savent bien qu'il y a peu de chance pour qu'il en soit ainsi. Aussi avancent-elles une autre proposition à la majorité DP-LSAP-Déi Gréng : pourquoi ne pas envisager «une neutralisation financière complète»? C'est-à-dire bien au-delà des 500 euros dont il est actuellement question comme compensation à l'égard des seules entreprises des secteurs dits vulnérables et le commerce de détail. Le secteur de la construction, qui emploie nombre d'effectifs au salaire minimum juste à la marge supérieure, ne pourrait-il pas être intégré lui aussi?
Ainsi, les présidents Tom Oberweis (Métiers) et Luc Frieden (Commerce) souhaiteraient que l'accompagnement voie son champ élargi mais aussi sa durée, «au moins de 2021 à 2023». A défaut d'en débattre dans une hypothétique nouvelle tripartite, les deux Chambres suggèrent donc que le gouvernement décide d’un amendement au projet de budget 2021 et pour la programmation pluriannuelle pour la période 2020-2024 afin d'intégrer ce nouveau dispositif pour les années à venir.
Qui? Combien?
En décembre 2018, 61.746 salariés étaient rémunérés au voisinage du salaire social minimum (SSM). Soit environ 15% des salariés au Grand-Duché (fonctionnaires exclus). Selon la Banque centrale du Luxembourg, «les salariés rémunérés au SSM sont principalement employés dans le commerce (près d’un quart d’entre eux), dans l’hébergement et la restauration (un peu plus de 15%) et dans le secteur de la construction (environ 10 %).» 58% des travailleurs rémunérés au voisinage du SSM résident au Luxembourg, les 42% restants étant des salariés frontaliers.