La «machinerie» de l'Holocauste au Luxembourg
Dès l'automne 1940 commence la «terrible machinerie» de l'Holocauste qui conduira à la ségrégation de la population juive et à la déportation. «En tout, sept convois» quitteront le Luxembourg en direction des camps et des ghettos, rappelle l'historien, Steve Kayser [en VIDEO].
La ségrégation de la population juive au Luxembourg démarre dès l'automne 1940. © PHOTO: Screenshot video wort.lu
PAR MAURICE FICK
Dès l'automne 1940 commence la «terrible machinerie» de l'Holocauste qui conduira à la ségrégation de la population juive et à la déportation. «En tout, sept convois» quitteront le Luxembourg en direction des camps et des ghettos, rappelle Steve Kayser, historien et directeur du Centre de Documentation et de Recherche sur l'Enrôlement forcé.
Le Luxembourg n'a pas échappé à la terreur nazie et dès 1940 sa population juive a méthodiquement était isolée. A l'occasion de la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l'Holocauste, ce mardi 27 janvier, l'historien Steve Kayser, revient sur ce pan sombre de l'histoire luxembourgeoise et raconte l'Holocauste. Sans en éluder les questions nouvelles qui se posent quant à la collaboration ou non des Luxembourgeois dans l'Holocauste.
Sous occupation nazie depuis le 10 mai 1940, le Luxembourg appliquera la même année les terribles lois raciales de Nuremberg. «Dès l'automne 1940, la terreur nazie s'acharne contre les juifs. A partir de là se met en route une terrible machinerie» qui conduira à la ségrégation de la population juive. Un isolement qui passe par une limitation d'accès des juifs à certains lieux, une réduction de leur liberté de mouvement, le bannissement de leurs enfants des écoles, etc...
Steve Kayser: «696 juifs ont été déportés vers l'ensemble des ghettos et des camps. Seuls 56 rentrèrent au Luxembourg» à la fin de la guerre. © PHOTO: Screenshot video wort.lu
De sorte que 1941 sera au Luxembourg, «l'année culminante du processus antisémite». Comme «l'étau va se resserrer de plus en plus», les juifs seront évincés de certaines professions, notamment libérales mais aussi de la Fonction publique. Comme ailleurs en Europe, les juifs luxembourgeois n'échappent pas au port d'un brassard jaune, et plus tard, au port de l'étoile jaune.
696 juifs déportés vers les ghettos et les camps
C'est en 1941 que «commencent les véritables déportations vers les camps d'extermination en passant souvent par des ghettos », résume Steve Kayser. Le professeur d'histoire qui s'est très tôt fait un devoir d'enseigner la Shoah au lycée, raconte comment sont entassés «les juifs invalides ou trop jeunes dans l'ancien couvent de Cinqfontaines (au Nord du Luxembourg, ndlr), un véritable camp de transit où on pratique la dernière spoliation».
«Il y aura en tout, sept convois» qui quitteront le Luxembourg en direction des camps de la mort. Pas moins de «696 juifs ont été déportés du Luxembourg vers l'ensemble des ghettos et des camps. Seuls 56 rentrèrent» à la fin de la guerre.
«Soixante ont survécu à Luxembourg car ils étaient mariés à des non juifs. 30 auraient été aidés pour s'enfuir ou se cacher. Plus de 600 juifs luxembourgeois furent déportés à partir de la France ou de la Belgique. Parmi eux, 16 ont survécu», résume l'historien.
Steve Kayser: "L'une des questions récentes qui a surgi -et posée par un certain nombre de jeunes historiens- est de savoir si le Luxembourg n'avait pas aidé l'occupant dans cette politique antijuive" © PHOTO: Screenshot video wort.lu
«Une question que nous devons poser»
A la fin des années 1990 naît une autre dynamique au Luxembourg pour «étudier de plus près le sort de la population juive pendant la Seconde guerre mondiale», explique le directeur du Centre de Documentation et de Recherche sur l'Enrôlement forcé.
Ce n'est que depuis le début des années 2010 que d'autres questions délicates se posent au Luxembourg sur cette période noire. Comme celle de «la collaboration des Luxembourgeois dans l'Holocauste. L'une des questions récentes qui a surgi -et posée par un certain nombre de jeunes historiens- est de savoir si le Luxembourg n'avait pas aidé l'occupant dans cette politique antijuive: oui ou non? Une question, à l'étude, que nous devons poser», estime Steve Kayser.