Le centre de soins pour la faune sauvage atteint ses limites
Il a accueilli pas moins de 4.000 pensionnaires l'année dernière. Le centre de soins pour la faune sauvage de Dudelange est plein à craquer, et nécessite d'être agrandi.
© PHOTO: Anouk Antony
(BaL avec Glenn SCHWALLER) Lorsque Jill Gaasch entre dans l'enclos, tous les regards sont tournés vers elle. Du moins, ceux des ratons laveurs qui sont hébergés depuis le printemps dernier dans le centre de soins pour la faune sauvage de Dudelange. Les petits prédateurs ne s'agitent guère, car ils sont désormais habitués à la présence humaine. Ils ne se laissent toutefois pas toucher, comme l'explique Jill Gaasch.
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Elle dirige le centre de soins géré par l'organisation "natur&ëmwelt", qui se consacre depuis plus de 30 ans au bien-être des animaux sauvages et doit faire face à une affluence toujours croissante. Ainsi, les sept ratons laveurs font partie des quelque 4.000 animaux que l'établissement a accueillis l'année dernière. A titre de comparaison, il n'y avait que 83 animaux lors de la création de l'installation en 1988. Mais l'affluence ne cesse de croître. Si rapide qu'une extension de l'installation est devenue entre-temps inévitable. «Nous manquons de place», regrette Jill Gaasch.
Si février est traditionnellement le mois le plus calme de l'année, c'est surtout en été que de nombreux pensionnaires animaux viennent grossir les rangs du refuge. Le mois de juin est particulièrement agité, avec jusqu'à 80 animaux accueillis en un seul jour. Par conséquent, les structures existantes de l'installation atteignent de plus en plus leurs limites.
Unique en son genre
L'agrandissement du centre de soins, actuellement en cours, est donc la seule alternative pour pouvoir assurer l'accueil de ces nombreux animaux sauvages. Il se déroule en plusieurs phases de construction, afin de permettre de ne pas devoir fermer complètement l'établissement pendant les travaux, car il s'agit du seul établissement de ce type au Luxembourg.
Même si le nombre d'animaux hébergés dans le centre de soins ne cesse d'augmenter, son objectif principal n'a pas fondamentalement changé depuis sa création, il y a plus de 30 ans. Le principe directeur reste le même: accueillir les animaux sauvages malades, les aider à reprendre des forces et les relâcher ensuite dans la nature. Dans environ un tiers des cas, les soigneurs parviennent effectivement à relâcher les animaux après leur guérison, rapporte la directrice du centre. Mais pour la majorité des pensionnaires, les blessures sont si graves qu'il n'est plus possible de les aider.
Dans le cas des ratons laveurs, qui semblent bien se porter dans leur enclos, il ne sera toutefois pas possible de les réintroduire dans leur habitat naturel pour une tout autre raison. Les ratons laveurs étant considérés comme une espèce envahissante dans l'UE depuis 2016, ils ne peuvent donc pas être relâchés dans la nature. Ces animaux sauvages seront placés dans des parcs.
Des pensionnaires atypiques
La visite du bâtiment principal de l'installation indique que le centre n'accueille pas seulement des animaux sauvages locaux, mais aussi des espèces exotiques. C'est là que séjourne Elvis, un caméléon qui est censé vivre dans le climat tropical de l'Amazonie. Il a cependant été trouvé à Remerschen, probablement abandonné par son ancien propriétaire. Il n'y aurait eu aucune chance de survie, surtout en hiver. Après avoir été sauvé, il vit désormais dans un terrarium au premier étage de l'établissement.
Un hérisson à ventre blanc, dont l'habitat naturel est la savane africaine, a connu un sort similaire. Il a été trouvé dans un carton au bord de la route et a ensuite été confié au centre de soins.
Il ne s'agit pas de cas isolés, bien au contraire. Au Luxembourg aussi, la tendance est à l'acquisition d'animaux exotiques. C'est surtout internet qui a rendu le commerce d'animaux sauvages nettement plus facile. «C'est un gros problème», explique Jill Gaasch. En effet, de nombreuses personnes sous-estiment l'effort que représente l'élevage d'animaux exotiques. Elle cite à titre d'exemple l'élevage des perroquets. Ceux-ci ont une espérance de vie allant jusqu'à 70 ans, un fait que certaines personnes semblent ignorer lors de l'acquisition d'oiseaux exotiques.
Une tendance problématique
Pourtant, ce sont justement les animaux exotiques qui posent de grands défis aux responsables du centre de soins, surtout sur le plan administratif. Pour pouvoir placer les animaux, il faut en effet disposer des documents juridiques nécessaires à leur détention, les fameux papiers CITES, une sorte de carte d'identité pour les animaux appartenant aux espèces menacées. «Aucun détenteur sérieux ne prendrait en charge un animal sans ces papiers», estime la directrice.
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Et souvent, lorsque ces animaux exotiques sont retrouvés au Grand-Duché, ces papiers manquent. Il est également possible que les anciens propriétaires n'aient jamais disposé des documents correspondants. Les bénévoles du centre de soins doivent donc demander eux-mêmes les certificats nécessaires auprès des autorités compétentes, un processus qui prend généralement plusieurs mois. Dans le cas du caméléon Elvis également, l'obtention des documents nécessaires est encore en attente, tandis qu'un acheteur s'est déjà manifesté pour acquérir le reptile.
Même sans la présence de ces animaux exotiques, Jill Gaasch et son équipe croulent suffisamment sous le travail. En effet, le centre de soins accueille en principe tout animal sauvage. Mais en ce moment, deux exceptions sont en vigueur. Aucun oiseau d'eau n'est actuellement accueilli en raison de la grippe aviaire, et d'autre part, la peste porcine empêche l'arrivée de nouveaux cochons.
Dans une autre pièce, le patient suivant attend déjà les soignants: un petit lapin. Lucie Posteau, directrice adjointe du centre de soins pour animaux sauvages, se charge de nourrir la boule de poils, enveloppée dans une couverture. «Les lièvres sont très sensibles, ils doivent toujours être traités par la même personne les premiers jours», explique Jill Gaasch, tout en précisant qu'il ne faut pas trop parler pendant le nourrissage, afin de ne pas exciter l'animal inutilement.
Même si ce travail au contact des animaux semble être un métier de rêve, c'est un travail épuisant que les employés du centre doivent accomplir chaque jour. Ils ne peuvent absolument pas se permettre de faire des pauses, Noël et 1er janvier compris.
Au total, quatre soigneurs animaliers travaillent en permanence à cet effet dans l'établissement. S'y ajoutent quatre autres soigneurs qui ne travaillent que pendant la période de pointe, lors des mois d'été. Actuellement, une vétérinaire est employée à plein temps et une autre est en cours de recrutement. L'établissement dispose également d'un secrétariat et de personnel technique.
Des bénévoles nécessaires
Afin d'assurer les soins de tous les animaux, les forces du personnel ne suffisent pas. Il est également nécessaire de faire appel à des bénévoles. Alors que presque toutes les activités bénévoles ont dû être suspendues pendant la pandémie, l'une de leurs tâches centrales a été maintenue: ils veillent à ce que les animaux trouvent le chemin vers le centre de soins de Dudelange.
Lorsqu'un animal sauvage blessé est trouvé, il existe en effet plusieurs possibilités d'action pour apporter de l'aide. D'une part, les personnes concernées peuvent apporter elles-mêmes l'animal au centre de soins. Une option que les responsables préfèrent, car ils ne peuvent pas se charger eux-mêmes de chaque transport compte tenu des effectifs réduits et des nombreuses demandes.
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Dans ce contexte, il est préférable de transporter les animaux blessés dans un carton préalablement perforé afin que l'animal puisse continuer à respirer. Il faut à tout prix éviter de soigner les animaux par ses propres moyens.
Puisque les personnes qui trouvent les animaux ne peuvent pas toutes se rendre à Dudelange, des conteneurs de dépôt ont été mis en place. Il y en a maintenant quatre. Outre un conteneur situé à l'entrée du site de Dudelange, il existe d'autres sites à Junglinster, Niederfeulen et Clervaux. Dans ces conteneurs se trouvent plusieurs boxes dans lesquels les animaux peuvent être déposés. Des collaborateurs ou des bénévoles viennent ensuite les chercher et les amènent au centre, où ils peuvent être pris en charge.
Auch in Düdelingen können Tiere in der Drop-off-Box abgesetzt werden. © PHOTO: Anouk Antony
Afin de ne pas manquer l'arrivée d'un animal, les conteneurs sont équipés d'un système d'alarme complet. Si, par exemple, la porte du centre de dépôt de Junglinster est ouverte, le centre de soins de Dudelange reçoit un message. Le transport de l'animal peut alors immédiatement avoir lieu.
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Dans les cas où les personnes qui trouvent un animal blessé ne sont pas en mesure de l'apporter dans l'un des conteneurs ou au centre, il est possible que des bénévoles se chargent du transport.
Le centre de soins est financé par différentes sources: une petite partie provient de subventions publiques, mais la plus grande partie provient des dons. Pour l'extension actuelle de l'installation, l'établissement est également à la recherche de nouveaux sponsors. Tout soutien est nécessaire, car il faut s'attendre à ce que le nombre d'animaux à soigner augmente encore dans les années à venir.