Les conjoints violents sous surveillance électronique?
La ministre de l'Egalité entre les hommes et les femmes reconnaît qu'elle accueillerait «positivement»l'introduction de cette sanction pour les auteurs de violences domestiques. L'idée fait son chemin.
En moyenne, l'an passé, la police a procédé à 23 expulsions de partenaires violents chaque mois. © PHOTO: Photo archives : Marc Wilwert
Au Luxembourg, le bracelet électronique ne concerne pas tous les types de délit. Ainsi, un juge peut-il avoir recours à cette «modalité d’exécution d’une peine privative de liberté» pour des auteurs d'infraction au Code de la route, des condamnés dans des affaires de stupéfiants, contre des délinquants impliqués dans des vols. Et si depuis 2015, cette «peine alternative» a concerné plus de 160 hommes et femmes au pays, jamais elle ne s'est appliquée pour des auteurs de violences domestiques.
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La raison de ce choix n'est pas à chercher du côté des magistrats, mais plutôt de la loi elle-même. En effet, pour l'heure rien dans les textes ne prévoit le recours à ce mode de surveillance électronique pour des infractions de coups sur conjoints ou proches.
Depuis 2003, la société s'appuie donc soit sur l'emprisonnement, soit sur le mécanisme de l’expulsion, sur ordre du procureur d’État, pour interdire à l’auteur des violences de s’approcher de sa ou ses victimes. La violation d’une telle interdiction étant alors passible d’une peine d’emprisonnement (de 15 jours à deux ans ainsi que d’une amende).
Etat des lieux
En 2021, 1.697 personnes ont été reconnues comme victimes de violences domestiques suite à des interventions policières, 60% étaient de sexe féminin.
Cependant, voilà déjà des années que l'idée d'introduire au Grand-Duché le bracelet électronique anti-rapprochement trotte dans les esprits, à la Chambre comme au ministère de la Justice. Mais, vendredi à l'occasion d'une réponse parlementaire, c'est la ministre de l'Egalité entre les femmes et les hommes qui a remis la question sous les feux de l'actualité. Une Taina Bofferding (LSAP) signifiant son approbation pour l'arrivée d'un tel dispositif dans l'arsenal juridique luxembourgeois.
En réponse à une interpellation de la députée Françoise Hetto (CSV), la ministre a aussi rappelé qu'un «groupe de travail» était (toujours...) en train d'analyser la possibilité d'étendre la mesure aux faits de violence domestique. Commentant au passage: «Nous accueillons positivement le déploiement d'un tel bracelet électronique».
Qui porte un bracelet?
Selon le ministère de la Justice, le nombre de bracelets électroniques déployés en 2020 a varié, selon les mois, de 7 à 23 condamnés. A défaut de parité, la mesure a été appliquée aussi bien à des hommes (en majorité) qu'à des femmes.
Le Luxembourg, à la traîne sur le sujet, rejoindrait ainsi des Etats comme l'Espagne ou la France qui ont déjà intégré cette sanction à leur panel de condamnations. La Suisse le fera en 2022. Si le Grand-Duché suit cette voie, encore faudra-t-il s'assurer qu'en cas de rapprochement du condamné avec sa victime, les forces de police soient en mesure d'agir rapidement. La réactivité de ces dernières impliquant la protection des proches.
En attendant, Taina Bofferding se satisfait de la disponibilité de places d'hébergement pour les victimes de violences domestiques. Si le phénomène s'est accentué avec la crise covid (+11% d'interventions policières dans ce cadre en 2020), la ministre indique que la capacité d'accueil a suivi ce mouvement. Avec les partenaires agréés, le ministère a ainsi financé 161 places d'hébergement en 2020. Et cette année, l'offre a été augmentée de 17 lits.
Même si comparaison n'est pas raison, la ministre note au passage que dans le domaine le Luxembourg fait mieux que son voisin français. Si dans l'Hexagone les dispositifs d'assistance aux victimes s'appuient sur un réseau de 6.700 places, au prorata du nombre d'habitants, le Grand-Duché fait ''mieux''. Avec un ratio de 2,8 lits à disposition pour 10.000 habitants, quand la France arrive au tiers de cette capacité.