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Le 30 novembre

Manifestation pour l'inauguration de la prison de Sanem

Pour plusieurs associations venant en aide aux détenus, cette nouvelle prison est un non-sens complet.

D'ici Noël prochain, la population carcérale de l'établissement fraîchement ouvert ne devrait pas dépasser les 100 détenus sur une capacité totale d'accueil de 400 personnes.

D'ici Noël prochain, la population carcérale de l'établissement fraîchement ouvert ne devrait pas dépasser les 100 détenus sur une capacité totale d'accueil de 400 personnes. © PHOTO: Crédit: Administration pénitentiaire du Grand-Duché de Luxembourg

Journaliste

D'ici Noël prochain, la population carcérale de la nouvelle prison de Sanem ne devrait pas dépasser les 100 détenus sur une capacité totale d'accueil de 400 personnes, de quoi grandement soulager Schrassig et sa surpopulation ponctuelle. Le projet est, en effet, en passe d'être concrétisé et sera d'ailleurs inauguré le 30 novembre prochain, notamment en présence du Grand-Duc.

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Une inauguration qui risque d'être quelque peu perturbée par un piquet de protestation organisé par l'ASBL Eran, Eraus... an Elo? qui soutient les personnes incarcérées, pendant et après leur détention. Soutenue par d'autres associations du milieu carcéral, l'ASBL compte manifester peu de temps avant l'inauguration pour mettre en lumière certaines réalités carcérales.

Pour les membres de Eran, Eraus... an Elo?, il n'y a pas de «quoi se réjouir» de l'ouverture d'une nouvelle prison. «Au contraire, cela montre que le Luxembourg ne parvient pas à gérer les problèmes à la racine. 85% des gens qui sont mis en prison n'y ont pas leur place», a ainsi déclaré le président Christian Richartz de l'ASBL 'Eran, Eraus... an Elo?', dans un communiqué.

Incarcérés pour des faits de petite délinquance

Et l'homme de préciser son propos. «Au Luxembourg, la majorité des gens sont en prison pour des faits de petite délinquance: le ''vol simple'' et les délits liés à la drogue. Cela inclut un grand nombre de personnes en détention provisoire, c'est-à-dire des personnes emprisonnées, mais non condamnées.»

Comme nous l'indiquait Serge Legil, directeur de l'administration pénitentiaire, il y a peu, la nouvelle structure de Sanem sera dédiée à la détention provisoire avant tout. «Le Luxembourg est l'un des seuls pays du monde qui ne disposait pas d'un établissement dédié à ce type de détention, pour les personnes en attente de leur procès», expliquait-il.

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Et pourtant, la prise en charge serait complètement différente qu'avec d'autres détenus. «Car il y a beaucoup plus de mouvements, contrairement à un centre pénitentiaire exclusivement fermé. Par exemple, la nouvelle prison de Sanem disposera de locaux réservés à la police en charge des transports des détenus. Cela permettra également une meilleure prise en charge psychologique puisque la prise en charge sera spécifique aux détenus supposément là pour une courte période. On table d'ailleurs sur une occupation maximale d'un an, voire 18 mois maximum pour chaque détenu».

Un projet à 200 millions d'euros

Toutefois, pour l'ASBL Eran, Eraus... an Elo?, la nouvelle prison de Sanem envoie un très mauvais message. «L'État pourra, à l'avenir, enfermer encore plus de personnes sans condamnation, tellement de personnes que la construction d'une nouvelle prison, qui a coûté 200 millions d'euros, était nécessaire...», pestent-ils, pointant du doigt la lenteur du système judiciaire luxembourgeois. «On parle de précarité et de la crise du logement, mais ils sont parvenus à investir des centaines de millions sur une dizaine d'hectares pour assouvir leur fantasme de répression.»

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Pour l'ASBL Richtung22, le taux d'incarcération «n'est pas en relation avec le taux de criminalité, il s'agit ici d'une volonté politique». Ces derniers revendiquent leur droit à s'opposer au projet de Sanem, tout en rappelant leur vision du système carcéral. «Les conséquences de la captivité sont graves et il est scientifiquement prouvé que l'isolement n'a aucun effet de réhabilitation. Au contraire, les gens sont désocialisés, perdent leur travail, leur logement, leur sexualité, leur dignité et le sentiment d'être utile à la société. De plus, cela supprime leur autonomie et leur pouvoir de décision. Ce n'est pas une coïncidence s'il est difficile de sortir du cycle carcéral, même pour les familles des prisonniers.»

Ada Günther, de l'ASBL Richtung22, plaide ainsi pour des réformes et d'autres moyens de réinsertion sociale des détenus. «Nous appelons ensemble à soulever cette question publiquement et à ne pas rester à la traîne.» Une chose est certaine: les voix des membres de ces associations risquent d'être entendues le 30 novembre prochain, lors de l'inauguration de la prison de Sanem.

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