Objectif 100% «bio» en 2050
Après une parenthèse au ministère des Sports de 2013 à 2018, Romain Schneider (LSAP) a fait son retour à l'Agriculture. La réorientation vers le «bio» et les accords de libre-échange entre l'UE et le Mercosur sont au centre de ses préoccupations.
Romain Schneider se montre très critique vis-à-vis de l'accord de libre-échange entre l'UE et le Mercosur © PHOTO: Guy Wolff
(JFC, avec Marc Hoscheid). - Wiltzois bon teint, Romain Schneider (57 ans, LSAP) a retrouvé son poste de ministre de l'Agriculture suite aux élections législatives du 14 octobre 2018. «Je ne l'avais pas quitté à ma propre demande en 2013, mais parce que la constellation entre les partis de la coalition à l'époque était très différente. Toutefois, j'ai beaucoup aimé être ministre des Sports, car je proviens de ce sérail.»
Dix ans après sa première entrée au ministère de l'Agriculture, la situation a sensiblement évolué et les connections avec les matières spécifiques d'environnement foisonnent. De là à promouvoir l'idée d'un regroupement des deux domaines, Romain Schneider ne franchit pas le pas. «Il n'a jamais été question de ne pas maintenir l'Agriculture comme un ministère distinct, à part entière», assure le ministre.
Promotion du «bio»
Et ce dernier d'assurer que «la coopération a toujours bien fonctionné au cours des six dernières années et j'espère que cela continuera d'être le cas lors des quatre prochaines avec mon homologue de l'Environnement, Carole Dieschbourg (Déi Gréng), et peu importe finalement quel parti est à la tête de quel ministère. Certes, en théorie, en prenant en compte les thématiques transversales, on pourrait imaginer la création d'un énorme ministère.»
Qui dit environnement, dit bien entendu aussi promotion de l'agriculture «bio», et les questions sous-jacentes de son potentiel et de la rapidité de la transformation à effectuer. Un thème central dans les attributions de Romain Schneider.
«Aujourd'hui, de nombreux produits «bio» ne proviennent pas encore du Luxembourg, et nous devons combler ces lacunes», estime Romain Schneider. © PHOTO: Guy Wolff
Qui dit environnement, dit bien entendu aussi promotion de l'agriculture «bio», et les questions sous-jacentes de son potentiel et de la rapidité de la transformation à effectuer. Un thème central dans les attributions de Romain Schneider.
«L'objectif avancé de 20% par rapport à la superficie utilisée pour l'agriculture d'ici 2025 est un défi que nous nous sommes fixé. Mais je crois que d'autres indicateurs doivent être pris en compte pour l'acceptation du «bio» dans la population: par exemple, le nombre de producteurs dans le pays, ou celui des produits «bio» luxembourgeois dans les rayons des magasins. Aujourd'hui, beaucoup de ces produits ne proviennent pas encore du Luxembourg, et nous devons combler ces lacunes, en particulier dans les secteurs de la viande, et des fruits et légumes.»
Réalistement optimiste et surtout volontariste, Romain Schneider refuse néanmoins de tomber dans l'utopie. «J'ai conscience qu'il sera difficile d'augmenter sensiblement le nombre de surfaces cultivées biologiquement, car les fruits et surtout les légumes peuvent être plantés sur des surfaces relativement petites. Pour moi, les 20% ne concernent pas seulement le nombre lui-même, mais doivent surtout nous permettre d'emprunter en 2025 la bonne voie vers une agriculture durable à 100%. Et ceci, d'un point de vue aussi bien écologique, qu'économique et social.»
La question du coût élevé des produits «bio», susceptible de freiner leur vente et leur consommation n'est pas de nature à rebuter le ministre. «Je pense que certains sont prêts à payer plus cher, car le plus important pour les gens est qu'ils peuvent comprendre le chemin parcouru par les produits au cours du processus de fabrication. Dans le cadre du nouveau plan d'action biologique, nous demanderons très précisément aux gens quels produits ils sont prêts à payer plus cher et à quel tarif. Nous serons alors en mesure d'adapter notre gamme aux besoins spécifiques des consommateurs.»
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Romain Schneider insiste aussi sur le fait qu'une consommation durable et responsable implique «des produits régionaux et saisonniers, car tous les types de fruits et légumes ne peuvent pas être cultivés toute l'année sous nos latitudes. Il n'y a par exemple pas nécessairement besoin de consommer des fraises à Noël. Mangeons ce que nous cultivons dans nos jardins.»
Soucieux du respect de l'environnement et d'innovation technique, le socialiste s'érige par contre en farouche opposant aux aliments génétiquement modifiés. «De tels produits n'existent pas au Luxembourg, et nous veillons à ce qu'ils ne puissent pas pénétrer sur le marché luxembourgeois.»
Romain Schneider: «Lorsque nous importons des marchandises, nous devons nous assurer qu'elles respectent certaines normes.» © PHOTO: Guy Wolff
A l'international, le ministre de l'Agriculture se joint aux plaintes des agriculteurs envers l'accord de libre-échange conclu entre l'Union européenne et le Mercosur - la confédération commerciale sud-américaine qui regroupe l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay - qui permettra d'exporter vers l'Europe des denrées alimentaires produites selon des normes de qualité beaucoup moins strictes que celles qui s'appliquent ici.
«Je suis d'accord avec eux sur ce point: lorsque nous importons des marchandises, nous devons nous assurer qu'elles respectent certaines normes. Le commissaire européen responsable a été critiqué par presque tous les ministres de l'Agriculture, car pratiquement personne n'est satisfait du résultat. Une étude d'impact sera réalisée au niveau européen. Il n'y a aucune contrainte de temps, car le traité ne doit pas entrer en vigueur avant cinq ans et doit d'abord être ratifié par le Parlement européen et les parlements nationaux.»
En plus de l'agriculture, Romain Schneider est aussi en charge du portefeuille de la Sécurité sociale, la seconde casquette de son activité ministérielle. Il se réjouit de la décision de l'AMMD (Association des Médecins et Médecins-dentistes du Luxembourg) de mettre un terme à son boycott de la Commission de la nomenclature, «car nous poursuivons tous le même objectif, à savoir la mise en place d'une nouvelle nomenclature. Nous avons modifié le mode de fonctionnement et la composition de ladite commission.»
Mais le ministre n'a guère apprécié être ainsi mis sous pression par le corps médical. «Ce n'était pas normal! Cette attitude était dictée par l'imminence des élections, une période où traditionnellement tout le monde tente de placer ses propres intérêts au centre du jeu. Cela m'a certainement fait du tort au résultat des urnes, sans toutefois avoir eu un impact massif sur le résultat. En fin de compte, de telles actions ne conduisent qu'à la méfiance et à l'amertume.»