Parité au gouvernement: 23 organisations écrivent à Bettel
C'est une première: suite aux élections législatives du 14 octobre qui ont vu reculer le nombre de femmes élues, une vingtaine de syndicats, associations et ONG ont adressé une lettre au formateur du gouvernement pour réclamer la parité au sein de la future équipe.
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Rassemblés autour d'une plateforme d'action baptisée JIF 2019 (pour Journée internationale de la Femme 2019), 23 associations, syndicats, partis politiques et ONG, lancent un appel au formateur pour une composition paritaire du futur gouvernement.
Les signataires de cette lettre ouverte à Xavier Bettel demandent un programme gouvernemental ambitieux sur ce thème et insistent sur l'importance d'un ministère chargé de la question de l'Egalité des Chances doté de moyens suffisants pour "mener de réelles politiques d'égalité".
La campagne "Votez pour l'équilibre!" initiée par le Conseil national des femmes début octobre n'a pas eu l'effet escompté: non seulement le choix des électeurs est loin d'être paritaire, mais la part des femmes élues régresse par rapport aux élections précédentes.
60 sièges de députés étaient à pourvoir.
547 candidats se sont présentés: 249 femmes et 298 hommes. Les partis politiques étaient menacés de sanctions financières si leurs listes ne comportaient pas un minimum de 40% de candidates. Ce qui a permis d'atteindre le taux record de 45% de femmes candidates.
Une campagne de sensibilisation a été menée par le CNFL pour inciter les électeurs et électrices à accorder plus de place aux femmes dans la vie politique du pays.
Seulement 12 femmes ont été élues pour 48 hommes.
Un Parlement à 80% masculin
Le respect de la nouvelle loi imposant des quotas pouvait laisser espérer une hausse du taux de femmes qui seraient effectivement élues. Pourtant, le taux de candidates ayant obtenu un siège à la Chambre des députés n’est que de 20% contre 80% d’hommes élus.
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"Les femmes représentent la moitié de la population, elles ont des préoccupations différentes, des points de vue différents, des approches qui nourrissent le débat politique. Elles devraient participer à la prise de décision au même titre que les hommes", affirme Karin Manderscheid, présidente du CNFL.
Pour comparaison, en Belgique, les femmes représentent 41% des députés, 40% en France et 30% en Allemagne.
Retour en 1994
Comme on le voit sur ce graphique, les femmes candidates augmentent au fil des scrutins mais se heurtent à un plafond de verre. 99 ans après leur accès au droit de vote, elles ne parviennent toujours pas à se faire une place parmi les élus.
Cette année marque une régression du nombre d'élues pour la deuxième fois consécutive, avec un taux de femmes au Parlement identique à celui de 1994.
Sur les 7 partis à la Chambre, seuls 3 ont des élues
"Le constat est amer" pour le CNFL. A l'issue du scrutin, et en attendant la formation du gouvernement, seuls trois des 7 partis politiques présents à la Chambre des députés ont des femmes pour les représenter:
le CSV (6 élues)
le DP (3 élues)
et Déi Gréng (3 élues).
Le CNFL souligne que Déi Lénk qui présentait un chiffre record de 52,46% de candidates n'a aucune femme pour le représenter dans un premier temps. Néanmoins, ce parti effectue "une rotation" à mi-mandat et deux femmes remplaceront les deux hommes élus.
Un manque de visibilité?
Les 12 femmes plébiscitées par les électeurs sont toutes déjà impliquées en politique et/ou élues avant le scrutin de 2018:
9 d'entre elles étaient déjà députées en 2009 et 2013,
Sam Tanson l'est devenue en avril 2018,
Corinne Cahen et Carole Dieschbourg étaient ministres,
et Viviane Reding était députée européenne.
Le CNFL observe la même tendance pour les hommes, ce qui révèle une certaine difficulté pour les électeurs à faire confiance à de nouveaux candidats. Ceux-ci ne bénéficient sans doute pas de la même exposition médiatique que les plus anciens.
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"Plus spécifiquement, les femmes ont été très peu présentes dans les débats télévisés/radiophoniques durant la campagne", note le CNFL.
On peut ajouter que le système du vote par panachage au Luxembourg (accorder ses voix aux personnes et non aux partis) ne bénéficie pas aux femmes.
Des mesures urgentes
Le CNFL souhaite qu'à l'avenir, les listes électorales soient paritaires dans chaque parti et chaque circonscription. Il demande aussi une meilleure représentation et visibilité des candidates dans les médias, avec un temps de parole égal entre candidats et candidates lors de la campagne.