Retour sur le discours chargé en émotions du président Zelensky
Le président ukrainien a de nouveau appelé à un soutien accru de la part du Grand-Duché. Le Premier ministre, de même que l'ensemble des députés, ne sont pas restés insensibles aux sollicitations de Volodymyr Zelensky.
Vêtu de son désormais célèbre polo vert kaki, il a entamé son discours en s'essayant au luxembourgeois. © PHOTO: Guy Jallay
Le discours du président ukrainien Volodymyr Zelensky devant la Chambre des députés luxembourgeois était un événement très attendu. Tôt déjà ce jeudi matin, plusieurs dizaines de manifestants se sont présentés devant la Chambre des députés pour afficher leur soutien au peuple ukrainien à l'aide de banderoles et de drapeaux. À l'heure où tout le pays lutte depuis bientôt une centaine de jours contre l'envahisseur russe, les manifestants ont à nouveau imploré la fin d'un conflit qui a déjà tué des milliers de personnes.
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Au moment de débuter la séance, le président du Parlement Fernand Etgen a tenu à adresser un message fort à Volodymyr Zelensky. «Sachez que nous souffrons avec vous et que nous serons toujours à vos côtés pour traverser cette période funeste. Votre combat contre l'agresseur est un combat pour les valeurs européennes», a-t-il dit, avant de laisser la parole au président ukrainien.
Vêtu de son désormais célèbre polo vert kaki, il a entamé son discours en s'essayant au luxembourgeois. «Mir wëlle bléiwe wat mir sinn», a-t-il lancé. «Cette devise, c'est celle du Luxembourg. Elle signifie «nous voulons rester ce que nous sommes». Ces mots sont plus que jamais d'actualité pour nous. Nous voulons rester indépendants, libres et ouverts à toute l'Europe», a ajouté Volodymyr Zelensky, avant d'évoquer quelques chiffres particulièrement inquiétants et permettant de saisir toute l'ampleur du conflit à l'échelle européenne.
20% du territoire occupé par la Russie
«A l'heure où je vous parle, 20% de notre territoire est sous occupation russe. C'est largement plus que l'espace total du Benelux. Nos territoires sont souillés par des obus et des mines. 5 millions de nos compatriotes ont quitté le pays et 12 millions d'entre eux ont dû être déplacés.»
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Il n'a pas manqué de parler de la ville de Marioupol, véritable épicentre des combats. «La ville est complètement détruite alors qu'il s'agissait du fleuron de l'industrie européenne», a-t-il déploré. Le président a rappelé que le territoire qui doit être contenu est tout simplement immense. «Imaginez devoir tenir une ligne de front de 1.000 kilomètres au quotidien. Rien que ce mercredi, la Russie a tiré 15 missiles de croisière. Depuis le 24 février, 2.478 missiles ont été tirés. Ceux-ci visent avant tout les infrastructures civiles», a poursuivi le président ukrainien.
Une demande répétée de moyens
En réclamant, comme il le fait depuis le début de l'invasion russe, des armes et des moyens financiers supplémentaires, il n'a pas manqué de remercier le Luxembourg pour ses nombreuses contributions à la résistance, que ce soit en termes de moyens financiers et matériels. «Nous comptons beaucoup sur le soutien de nos partenaires européens et je suis très reconnaissant envers le Luxembourg pour son aide. En tant que pays fondateur de l'Europe, je suis convaincu que le Luxembourg se prononcera en faveur d'une procédure d'adhésion à l'Europe accélérée. Le grand potentiel technologique et industriel du Luxembourg pourrait être mutuellement profitable à l'Ukraine ainsi qu'au Grand-Duché».
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Des propos qui ont fait mouche auprès du Premier ministre qui n'a pas manqué de mettre en exergue la résilience des Ukrainiens et de son président. «Ce qui m'a le plus frappé, c'est la manière et l'énergie avec lesquelles vous avez refusé un destin qu'un voisin essaye de vous imposer», a adressé Xavier Bettel à l'égard de Zelensky, tout en réaffirmant son soutien. «Notre pays est l'un des plus généreux au niveau de l'aide ukrainienne et nous en sommes très fiers. 5.600 Ukrainiens ont déjà trouvé refuge au Luxembourg. L'initiative privée n'a pas connu de limite au Luxembourg et j'en suis très fier.»
De nouvelles aides «efficaces»
Se voulant discret sur le sujet, le chef de l'État n'a cependant pas éludé le fait qu'il converse de manière hebdomadaire avec le président ukrainien. «Je connais votre impatience. Je sais que vous aimeriez que cela aille plus vite. Nous perdons tous les jours de l'argent à cause de cette guerre. Vous, vous perdez des êtres humains», a précisé le Premier ministre, tout en annonçant de nouvelles aides «efficaces» à l'égard de l'Ukraine, notamment un soutien dans le cadre de sa demande d'adhésion à l'UE.
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Toutefois, Xavier Bettel a indiqué, à demi-mots, que Zelensky «prêchait déjà des convaincus» et qu'il était important que ce dernier trouve d'autres pays alliés, en Afrique par exemple. Il a également solennellement demandé au président ukrainien de se remettre à la table des négociations avec Poutine malgré le contexte actuel. «Je suis même prêt à apporter mon aide dans le cadre de possibles négociations. C'est la seule manière de sortir de cette situation». Rappelons toutefois que Xavier Bettel a d'ores et déjà annoncé qu'il ne comptait plus s'entretenir avec Vladimir Poutine en raison des récents massacres commis notamment à Boutcha.
Le président ukrainien a quitté la retransmission vidéo sous des applaudissements bien nourris de la part de toute la Chambre. Chaque famille politique a ensuite eu l'occasion d'apporter son point de vue quant à l'allocution de Volodymyr Zelensky. Des réactions dithyrambiques pour certains partis et plus mesurées pour d'autres.