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Bettel au Parlement européen

«Sans l'Europe, j'aurais été condamné à mort»

Ce mardi marque les 70 ans du Parlement européen. Xavier Bettel était présent et a prononcé un discours poignant et particulièrement personnel.

Xavier Bettel, en tant que Premier ministre de l'un des pays fondateurs de l'Europe, avait été spécialement convié au Parlement européen pour y tenir un discours poignant.

Xavier Bettel, en tant que Premier ministre de l'un des pays fondateurs de l'Europe, avait été spécialement convié au Parlement européen pour y tenir un discours poignant. © PHOTO: AFP

Journaliste

705 députés, 27 États membres et 24 langues officielles, voilà ce qui compose le Parlement européen, l'organe législatif de l'Europe, qui fête en ce mardi 22 novembre ses 70 années d'existence. Il y a 70 ans en effet, la première session de l'assemblée commune de la Communauté européenne du charbon et de l'acier se tenait à Strasbourg, marquant le point de départ de la structure que nous connaissons aujourd'hui.

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Comme le rappelle le site du Parlement, au fil des décennies, six pays européens sont devenus une Union de 27 États membres favorisant la démocratie, les droits fondamentaux, la stabilité économique et la croissance. «Le Parlement a été un acteur clé dans le développement de l'UE, passant de 78 représentants nationaux en 1952 à 705 députés élus au suffrage universel direct aujourd'hui.»

Ce mardi avait donc lieu une cérémonie spéciale dans l'hémicycle strasbourgeois. Une cérémonie à laquelle ont pris part les différents représentants des pays fondateurs de l'institution, dont le Luxembourg faisait partie aux côtés de l'Allemagne, de la France, de l'Italie, des Pays-Bas et de la Belgique. Côté luxembourgeois, le Premier ministre Xavier Bettel (DP) avait donc été convié pour prononcer quelques mots.

Loin des discours traditionnels de bons vœux, le Premier ministre s'est fendu d'une allocution poignante et résonnant avec l'actualité, n'hésitant pas à évoquer sa situation personnelle, fait plutôt rare de la part de l'homme d'État. «La paix n'est pas quelque chose d'acquis. Je suis d'origine juive, libéral et marié à un homme. Sans l'Europe, j'aurais déjà été condamné à mort à trois reprises», a-t-il lancé, tout en rappelant le rôle de l'ancienne ministre française, ancienne déportée, Simone Veil, première femme à présider le Parlement européen en 1979.

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Pro-Europe convaincu, Xavier Bettel a rappelé toute l'importance de l'organe législatif, de cette «épine dorsale» qui unit les différents territoires. «Cette richesse européenne n'a pas de limite et notre diversité doit rester notre force, ne nous divisons pas. Rapprochons chaque citoyen de ce projet européen, car l'Europe, cela ne signifie pas que recevoir, mais aussi donner», a-t-il conclu avant d'être chaleureusement applaudi et de céder sa place à la Première ministre française Elisabeth Borne.

«N'oublions pas que derrière l'invasion de l'Ukraine, ce sont bien la démocratie et les droits humains que la Russie attaque. C'est-à-dire le fondement même de ce qui nous rassemble ici», a-t-elle déclaré, citée par l'AFP. «Par la vigueur de son action, par sa détermination à défendre l'égalité, la liberté et la solidarité, le Parlement européen apporte un démenti cinglant à ces tentatives destructrices. Le cœur de la démocratie bat, ici-même, à Strasbourg, depuis 70 ans»,

«L'Assemblée n'a cessé de se renforcer»

La présidente du Parlement européen Roberta Metsola (Parti populaire européen) ne disait pas autre chose, comparant la structure à «un phare de la défense de la démocratie». «En 70 ans, l'Assemblée n'a cessé de se renforcer, passant d'un organe consultatif aux pouvoirs limités à une véritable institution embrassant la démocratie européenne et l'expression de l'opinion publique européenne». «Avec une guerre illégale en cours en Ukraine qui détruit, tue et sape la volonté politique du peuple, nous connaissons aujourd'hui plus que jamais l'importance de défendre la voix démocratique des citoyens et les valeurs démocratiques européennes que cette assemblée représente», ajoutait-elle en septembre dernier.

Le Parlement européen en quelques dates importantes

1952: Le traité de Paris institue la Communauté européenne du charbon et de l'acier, qui vise à instaurer un marché commun pour le charbon et l'acier afin d'éviter tout conflit autour de ces ressources précieuses. La CECA est le précurseur des futures organisations européennes. Au sein de celle-ci, on retrouve l'Allemagne de l'Ouest, la Belgique, la France, l'Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas.

1957: Le traité de Rome institue la Communauté économique européenne, dont le but est la mise en place d'une union douanière entre les États membres, et la Communauté européenne de l'énergie atomique, qui vise à promouvoir la coopération dans le secteur du nucléaire.

1958: La première réunion de l'assemblée commune des trois Communautés européennes se tient à Strasbourg, en France. Robert Schuman, Luxembourgeois de naissance, devient le premier président de l'institution connue sous le nom d'assemblée parlementaire européenne.

1962: L'assemblée parlementaire décide de prendre le nom de «Parlement européen». «Il faudra toutefois attendre 1987 pour que ce nom soit reconnu officiellement», comme l'indique le site du Parlement.

1971: Le traité de Luxembourg instaure un système de ressources propres qui remplace les contributions financières des États membres.

1973: Le Danemark, l'Irlande et le Royaume-Uni sont les premiers pays à rejoindre les Communautés européennes.

1975: Le Parlement européen adopte un rapport sur l'organisation d'élections européennes au suffrage direct. Celles-ci auront lieu pour la première fois en 1979.

1979: Simone Veil, ancienne ministre française de la Santé et rescapée du camp de concentration d'Auschwitz, devient la première présidente du Parlement élue, et la première femme à occuper ce poste.

1981: La Grèce devient le 10e État membre des Communautés européennes.

1986: L'Espagne et le Portugal rejoignent les Communautés.

1994: Le traité de Maastricht ouvre la voie à la création de l'Union européenne et de l'euro. Il instaure la procédure de codécision, qui donne au Parlement autant de poids que le conseil dans certains domaines législatifs, et octroie au Parlement le pouvoir d'approuver la composition de la Commission.

1995: L'Autriche, la Finlande et la Suède rejoignent l'Union européenne, faisant passer le nombre d'États membres à 15.

2002: L'euro est mis en circulation, permettant la création d'une union économique et monétaire en Europe.

2004: Dix pays, principalement d'Europe de l'Est, rejoignent l'Union: Chypre, l'Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, Malte, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie et la Slovénie.

2007: La Bulgarie et la Roumanie rejoignent à leur tour l'Union européenne.

2009: Le traité de Lisbonne place le Parlement sur un pied d'égalité avec les gouvernements européens en ce qui concerne le processus décisionnel pour presque tous les domaines d'action de l'Union.

2013: La Croatie devient le 28e État membre de l'Union.

2014: Les députés approuvent la composition de la nouvelle Commission et nomment le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker au poste de président de la Commission. L'ancien Premier ministre luxembourgeois était le candidat du groupe PPE lors des élections.

2016: Les électeurs britanniques décident d'une sortie de l'UE lors d’un référendum. Le résultat du référendum entraîne la démission du Premier ministre David Cameron. Celle qui le remplace, Theresa May, entame cette sortie en 2017.

Des projets concrétisés ces dernières années

L'institution européenne, un sacré melting pot bien souvent incompris et décrié par une grande partie de la population. Pourtant, plusieurs projets mis en place par le Parlement ont eu un impact considérable sur notre quotidien. Exemple en 2015 avec l'accord de Paris où les pays se sont engagés à réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Deux ans plus tard, en 2017, on se rappelle que les frais d'itinérance prélevés par les opérateurs téléphoniques disparaissaient. Cela a donc permis aux personnes qui effectuent un court séjour dans un autre État membre de l'Union de bénéficier des services de téléphonie mobile au même prix que dans leur pays.

L'année suivante, c'était la fin du géoblocage. Grâce à l’entrée en vigueur d’un acte législatif l'interdisant, les restrictions imposées par les boutiques en ligne en fonction de la nationalité ou du lieu de connexion appartenaient au passé. La même année, le règlement général sur la protection des données (RGPD) entrait d'ailleurs en vigueur, garantissant un niveau élevé de protection des données à caractère personnel.

Toujours dans cette optique de préservation du climat, en 2019, les députés adoptaient l'interdiction dans toute l'Union des produits en plastique à usage unique (assiettes, couverts, pailles, cotons-tiges, etc.) polluant les océans. Les produits couverts par cette nouvelle législation représentaient pas moins de 70 % de tous les déchets marins.

Ensuite, après les accords de Paris, en 2021, les députés européens votaient et adoptaient la loi européenne sur le climat, qui doit permettre de réduire de 55% les émissions nettes de gaz à effet de serre d'ici à 2030 et de zéro d'ici à 2050.

Enfin, cette année, rappelons que le Parlement européen a adopté les législations sur les services numériques et sur les marchés numériques. Leur objectif est de réglementer les grandes plateformes numériques et de créer un espace numérique plus sûr.

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