Surtension attendue sur les prix de l'énergie
Le cours du gaz et de l'électricité ne cesse de grimper sur les marchés mondiaux. Et pas de raison que les abonnés luxembourgeois n'échappent à la hausse. Mais de là à ce que cela change les habitudes des ménages, il y a un pas, selon l'expérience de l'Institut luxembourgeois de régulation.
Depuis le début de l'année, le prix du gaz a augmenté de 300%. Une hausse sensiblement atténuée pour le consommateur au final (+60%), mais tout de même. © PHOTO: AFP
Electricité, gaz, un peu partout les compteurs s'affolent. Avec la reprise, les prix de l'énergie sur les marchés de gros sont remontés en flèche ces derniers mois et d'autres hausses de la matière première peuvent déjà être envisagées. Mais, d'expérience, l'Institut luxembourgeois de régulation sait que les consommateurs sont au final peu regardants sur ce type d'aléas dans leur facture.
Une hausse des tarifs de l'énergie pour les abonnés luxembourgeois est-elle inéluctable?
Claude Hornick, chef de service Énergie (ILR) : «Déjà, il faut savoir que même si les coûts de production augmentent (que ce soit pour l'électricité ou le gaz), cela ne représente pas la totalité du prix du kilowattheure ou du m3 facturé. Le prix de revient pour le consommateur inclut aussi des taxes, des frais de transport et d'alimentation qui, eux, ne devraient pas varier. Par ailleurs, la facture de l'usager ne réagit pas à chaque soubresaut des cours du marché, heureusement. Les fournisseurs d'énergie passent des commandes globalisées, pour des volumes et des tarifs assurés. S'ils ont fait leur achat à une bonne date, à un bon tarif, il n'y aura pas lieu d'augmenter leurs tarifs.
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C'est ainsi que le prix de détail de l'électricité n'a pas connu d'augmentation pour le moment. Alors que dans d'autres pays, les factures ont grimpé. Pour le gaz, c'est un peu différent. Même si certains fournisseurs ont réussi à limiter la hausse, les consommateurs finaux ont tout de même été impactés.
Entre janvier et septembre, le prix de la molécule de gaz naturel facturée au ménage luxembourgeois a monté de 60%. Cela s'est traduit par une hausse de 30% dans le prix total du gaz (réseau et taxes inclus). Mais en comparaison, le prix de gros sur les marchés a monté de 300% sur la même période...
Mais la hausse s'imposera-t-elle à tous?
Camille Hierzig, directeur adjoint de l'ILR : «Certainement, mais à un niveau et à une vitesse qui dépendront de la stratégie d'achat du fournisseur retenu. Sachant que de toute façon, la société a l'obligation de prévenir le consommateur 30 jours à l'avance de toute hausse. Cela laisse le temps à chacun de voir comment il compte réagir. Baisser sa consommation, évaluer les autres offres disponibles, changer de mode énergétique par exemple.
Quels réflexes adoptent en général les abonnés en cas de hausse?
«Il faut reconnaître que les particuliers luxembourgeois ne réagissent guère à ce type d'événement. Mais cela s'explique en fait : le prix de l'électricité est bas au Grand-Duché (la moitié environ de ce que coûte un kWh pour un Allemand) et le pouvoir d'achat moyen plus élevé que dans bien des pays européens. Donc la réponse à une hausse des tarifs de l'énergie a toujours été modérée. La sensibilité est moindre quand vous avez plus de moyens financiers et des factures annuelles qui approchent les 1.200€ de gaz et 800€ d'électricité comme c'est le cas au Luxembourg, que lorsque vos revenus sont plus bas et la facture énergétique double...
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En plus, les abonnés ont la certitude que l'énergie leur sera toujours fournie. Ce n'est pas le cas partout. Ainsi, actuellement en Grande-Bretagne, plusieurs fournisseurs d'énergie ont fait faillite coupant l'alimentation de leurs clients du jour au lendemain.
Au Grand-Duché, certes le marché est concurrentiel et les prix libres, mais l'Etat a imposé la mise en place d'un ''fournisseur de dernier recours''. Autrement dit si l'une ou l'autre des sociétés venait à être en difficulté (ce qui ne semble pas être le cas) et à cesser son activité, aucune coupure n'est à craindre. Une autre prendra le relais, le temps pour l'usager de savoir avec qui il veut passer contrat pour la suite.
Les industriels ont-ils plus de crainte à avoir, en termes de concurrence?
«Déjà, jusqu'à présent, professionnels et gros industriels ont pu s'appuyer sur des tarifs de l'énergie relativement bas. L'avantage restera car si augmentation de la matière première il y a elle ne concernera pas que le Luxembourg. Les infrastructures électriques et gazières sont interconnectées, les tarifs de plus en plus alignés à l'échelle européenne. Il ne faut pas voir le Luxembourg comme un petit marché qui payera donc plus les pots cassés d'une éventuelle crise de l'énergie. Notre marché fait partie d'un ensemble intégré bien plus vaste, ce qui a comme effet de lisser toute hausse brutale éventuelle. Les industriels et les artisans n'auront donc pas plus à ''souffrir'' des tarifs pratiqués que leurs concurrents des autres Etats.
En Europe, certains industriels switchent déjà leur alimentation, passant du gaz au charbon. Dans certains pays, la formule s'avère plus avantageuse financièrement parlant et cela même s'ils doivent payer des taxes car ils dépassent le quota fixé par leur certificat CO2. Au Luxembourg, l'ILR n'a pas eu connaissance de ce type de basculement jusqu'à présent.
Les bons plans de Calculix
Faire jouer la concurrence peut être un bon moyen de réduire sa facture énergétique. Tout comme produire soi-même sa propre électricité et la consommer pour injecter seulement l’excédent sur le réseau. Et voilà déjà plusieurs années que l'ILR a mis en place sur son site un outil, Calculix, permettant de savoir en temps réel quel opérateur pourrait correspondre à moindre coût aux besoins de chaque ménage. «Mais le taux de switch reste encore faible», reconnait Camille Hierzig, directeur adjoint de l'Institut luxembourgeois de régulation. Pour preuve, en 2020, à peine 0,3% de l'ensemble des clients luxembourgeois ont fait le choix de passer à la concurrence. Dommage car il y a de belles économies à faire...
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