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Iran

Un manifestant iranien fait une grève de la faim devant la Chambre

Amir Labbaf a entamé une grève de la faim pour faire pression sur le Luxembourg afin qu'il déclare l'agence militaire iranienne comme une organisation terroriste.

Amir Labbaf veut protester pacifiquement.

Amir Labbaf veut protester pacifiquement. © PHOTO: Gerry Huberty

Un ancien prisonnier politique iranien mène une grève de la faim devant la Chambre des députés depuis vendredi, après que la police a fermé la tente de manifestation de son association iranienne de défense des droits de l'homme.

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Les militants protestent depuis huit jours pour faire pression sur le gouvernement luxembourgeois afin qu'il déclare une agence militaire spéciale défendant le régime iranien comme une organisation terroriste et qu'il sanctionne les dirigeants de la république islamique. La police a fait enlever la tente des militants avant la visite de la Première ministre finlandaise Sanna Marin.

«Ce n'est pas à cause de moi [que je suis en grève de la faim], c'est à cause des gens qui subissent des violences. [...] Nous savons que le Luxembourg est un pionnier de la préservation des droits de l'homme et nous attendons maintenant qu'il se place du bon côté de l'histoire», a déclaré Amir Labbaf.

Inscrire l'IRCG sur la liste des organisations terroristes

La semaine dernière, des activistes iraniens ont demandé au Grand-Duché de soutenir une résolution adoptée par le Parlement européen le mois dernier, demandant que l'UE prenne des sanctions contre les dirigeants du régime responsables de violations des droits de l'homme et ajoute le corps des gardiens de la révolution islamique (IRCG) à la liste des terroristes déclarés de l'Union européenne (voir ci-dessous).

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M. Labbaf, qui a été incarcéré neuf fois en six ans dans les prisons iraniennes et qui s'est exilé pendant deux ans, sait ce que cela signifie de souffrir aux mains du régime. Le ministre des Affaires étrangères Jean Asselborn avait entendu son histoire alors qu'Amir Labbaf était en Bosnie pour demander l'asile et l'a aidé à s'installer au Luxembourg, également en tant que demandeur d'asile.

«Le Luxembourg m'a rendu un grand service, mais nous attendons du Luxembourg qu'il le fasse pour tous les autres», explique-t-il.

Amir Labbaf proteste actuellement devant la Chambre, enveloppé dans des sacs de couchage et des couvertures pour le protéger du froid. Son fauteuil roulant et ses béquilles reposent à côté de lui tandis qu'il explique à quiconque est assez curieux les panneaux qui expliquent depuis combien de temps il occupe l'espace, depuis combien de temps il est en grève de la faim et la demande de son association iranienne des droits de l'homme de déclarer l'IRGC comme organisation terroriste.

Yves Cruchten, élu du LSAP, visite la tente avec Amir Labbaf

Yves Cruchten, élu du LSAP, visite la tente avec Amir Labbaf © PHOTO: Poulad Moradi

Amir Labbaf proteste actuellement devant la Chambre, enveloppé dans des sacs de couchage et des couvertures pour le protéger du froid. Son fauteuil roulant et ses béquilles reposent à côté de lui tandis qu'il explique à quiconque est assez curieux les panneaux qui expliquent depuis combien de temps il occupe l'espace, depuis combien de temps il est en grève de la faim et la demande de son association iranienne des droits de l'homme de déclarer l'IRGC comme organisation terroriste.

«Nous sommes un peu inquiets de sa situation à cause de la pluie», explique Poulad Moradi, un étudiant iranien en doctorat à l'université du Luxembourg, qui fait également office de secrétaire de l'association iranienne des droits de l'homme. Même s'il a des couvertures pour le froid, il n'a rien pour le protéger de la pluie.

«Il doit prendre des médicaments et suivre des séances de physiothérapie», ajoute Poulad, qui a confié au Luxembourg Times qu'Amir Labbaf a mis en suspens tous ses traitements médicaux afin de poursuivre sa grève de la faim.

Xavier Bettel n'a pas encore parlé avec Amir Labbaf

Poulad a partagé une vidéo d'un policier demandant à leur association de retirer leur tente et leurs chaises car, selon eux, ils violaient la sécurité routière à 1 heure du matin vendredi et qu'ils avaient besoin d'une autorisation.

L'association pour les droits de l'homme en Iran avait reçu une autorisation pour la manifestation et était en conversation avec des politiciens et des policiers pendant les quelques jours où ils avaient commencé à occuper l'espace, a expliqué Poulad, ajoutant que jusqu'à vendredi, ils n'avaient reçu aucune plainte.

Mais, avant l'arrivée de la Première ministre finlandaise vendredi, il leur a été demandé de retirer les chaises et les tentes qu'ils avaient installées. Les membres de l'association, qui ne souhaitent que protester pacifiquement, ont tout enlevé à la demande de l'officier de police, mais sont restés devant la Chambre pour accueillir le Premier ministre Xavier Bettel lors de sa promenade avec Sanna Marin.

Xavier Bettel a poursuivi sa promenade en disant qu'il était occupé avec son invitée, mais a promis de revenir parler avec Amir Labbaf dans les jours suivants. Il ne l'a pas encore fait.

«Depuis lundi dernier, la semaine dernière, nous avons décidé d'avoir une manifestation pacifique sans grève de la faim. [...] Mais après l'incident de vendredi matin, [Labbaf] a commencé sa grève de la faim», a confié Poulad en essayant d'aider à traduire Labbaf, qui ne parle que persan.

Amir Labbaf, qui se trouve actuellement près des escaliers situés au-dessus de la place principale de la Chambre des députés, a déclaré qu'il avait choisi cet endroit pour éviter de créer des barrages routiers. Son intention est de protester pacifiquement et de ne pas créer de problèmes.

Jean Asselborn soutient «les mesures fortes de l’Union européenne»

Le ministre des Affaires étrangères Jean Asselborn s'est positionné ce mardi par rapport aux revendications de la société civile iranienne. «Nous condamnons, ensemble avec l’Union européenne et tous les États membres, les violations flagrantes des droits humains des Iraniennes et Iraniens qui manifestent pour leur liberté, leur dignité et leur avenir», explique le ministre dans un communiqué. Et plus particulièrement, «les arrestations de masse de manifestants, la torture et les traitements cruels, inhumains et dégradants contre des détenus dans les prisons iraniennes, et les condamnations à mort et exécutions de manifestants.» Jean Asselborn rappelle que le Luxembourg est fermement opposé à la peine de mort «en toute circonstance et sans exception.» Rappelons qu'un résident luxembourgeois a été condamné à mort récemment en Iran.

Le ministre des Affaires étrangères souligne que le pays est «activement engagé dans les travaux en cours à Bruxelles pour préparer des mesures restrictives supplémentaires» à l'égard des membres du corps des gardes de la révolution islamique d'Iran (IRGC) qui figurent déjà sur la liste de sanctions de l’Union européenne.

Le gouvernement luxembourgeois «suit de près les travaux relatifs à la demande d’inscrire le corps des gardes de la révolution islamique d’Iran sur la liste des organisations terroristes de l’Union européenne.» Jean Asselborn rappelle encore qu'il soutient «toutes les mesures fortes de l’Union européenne prises de manière unifiée», et notamment celles qui seront prises lors du prochain conseil «Affaires étrangères» lundi prochain.

Jean Asselborn a également demandé à la directrice des affaires politiques du ministère des Affaires étrangères et européennes de recevoir ce 14 février Amir Labbaf et une délégation de la communauté iranienne «pour évoquer les efforts en cours par le Luxembourg et par l’Union européenne et pour discuter des demandes de la communauté iranienne au Luxembourg.» (m. m.)

Cet article est paru initialement sur le site du Luxembourg Times.

(Traduction: Mélodie Mouzon)

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