Virgule
Crise du logement

Un toilettage de la taxe foncière se prépare

Pour freiner la spéculation sur les terrains à bâtir, le gouvernement pourrait finalement lancer une nouvelle mesure fiscale. Le Premier ministre devrait en faire l'annonce dans son prochain discours sur l'état de la Nation.

Trop de terrains restent encore vierges de constructions car leurs propriétaires ont trouvé là une rente bien avantageuse, au détriment des capacités de logement du pays.

Trop de terrains restent encore vierges de constructions car leurs propriétaires ont trouvé là une rente bien avantageuse, au détriment des capacités de logement du pays. © PHOTO: Chris Karaba

Avant de prendre la parole pour son discours sur l'état de la Nation, Xavier Bettel (DP) multiplie les consultations. Et sans doute la majorité gouvernementale commence-t-elle à lancer quelques ballons-sondes pour mesurer les réactions à certaines initiatives potentielles. Ainsi, au micro de RTL, Gilles Baum (DP) vient-il d'annoncer de possibles mesures fiscales pour contrecarrer la flambée du prix des terrains constructibles notamment.

Lire aussi :La taxe foncière vingt fois plus chère à Diekirch

Quelles mesures? Le député libéral n'en a pas dit plus. Se contentant de rappeler que le chef de gouvernement avait l'intention de mettre l'accent sur la situation du marché du logement et la justice sociale dans son 7ème discours sur l'état de la Nation mi-octobre. Par contre, le chef du groupe parlementaire LSAP s'est montré un peu plus loquace. Georges Engel précisant qu'une réforme de la taxe foncière serait lancée avant la fin de la législature.

Voilà une déclaration plutôt inattendue. D'abord parce que le ministre des Finances, Pierre Gramegna (DP) a déjà clairement fait savoir qu'il n'entendait plus organiser une grande réforme fiscale. Le financement des mesures covid étant venu bousculer les perspectives économiques.

Surprise aussi car il y a encore quelques semaines, la ministre de l'Intérieur (en charge de ces questions foncières) affirmait qu'aucune réforme de la taxe foncière ne serait possible tant que l'ensemble des communes du Luxembourg n'auraient validé leur PAG (plan d'aménagement général). Et si l'argument de Taina Bofferding (LSAP) ne tient plus désormais, Georges Engel en a esquissé une raison : il serait possible d'établir des règles de calcul à l'avance.

Lire aussi :Taxer plus pour bâtir plus

Par ailleurs, c'est peu dire que la pression commence à monter sur ce sujet. En cette rentrée, les jeunes Verts (Déi Jonk Gréng) ont encore rappelé l'urgence d'une réforme de la taxe foncière. But : libérer des hectares de terrains jusque-là conservés par leurs propriétaires au profit de la spéculation plutôt que de la construction de ces milliers de logements abordables qui font cruellement défaut.

Pour l'opposition, ce changement de position gouvernementale est certes bienvenu mais... tardif. «Au cours des huit dernières années, les prix des logements ont augmenté de 59%», souligne ainsi Gilles Roth (CSV). Et le coprésident du groupe chrétien-social à la Chambre d'estimer que, depuis 2013, la majorité aborde cette question à contrecœur. Le CSV, de son côté, ne serait pas opposé à l'introduction d'une taxe nationale sur la spéculation immobilière comme foncière.

Mais Xavier Bettel pourrait bien sortir une autre réforme de son chapeau. Celle-ci porterait sur le taux d'amortissement accéléré. La mesure (qui permet aux propriétaires de déduire fiscalement une partie de leur investissement) pourrait bien être à nouveau révisée. Déjà cette année, le gouvernement a réduit le taux d'amortissement (de 6 à 5%) et raccourci la période pendant laquelle l'avantage fiscal s'applique (de six à cinq ans) mais cela ne pèse pas suffisamment sur l'envolée des prix.

Lire aussi :Vers un fichier des logements vacants

Côté LSAP, Georges Engel ne cache pas que le parti socialiste serait prêt à abaisser à 2% le taux d'amortissement accéléré, voire même à l'abolir complètement. Au DP, Gilles Baum verrait plutôt une limitation quantitative, expliquant que l'avantage pourrait être accordé pour un premier achat immobilier, «mais pas sur une quatrième, cinquième ou sixième maison».

Pour le CSV, Gilles Roth lance une autre piste : «Il faut en finir avec un système qui permet de retirer 50.000 euros d'impôts sur chaque nouvel appartement acheté sur cinq ans.» Chez Déi Gréng, on se montre plus mesuré sur le sujet; Josée Lorsché répétant que l'urgence était d'abord à la construction, en main, publique, de plus de logements encore et encore.

Xavier Bettel a trois semaines maintenant pour faire un choix sur cette question. Et c'est peu dire que le Premier ministre et son gouvernement sont attendus autour de cette préoccupation. On se souvient qu'en mars dernier une grande manifestation avait rappelé aux dirigeants le caractère crucial de cette problématique pour le bien-être de milliers d'habitants.

Sur le même sujet

Sur le même sujet