«Le monde sportif risque de subir un sérieux contrecoup»
Confinement, report de Tokyo 2020, avenir de son sport ou l'après covid-19 : la cycliste luxembourgeoise Christine Majerus évoque cette crise sans précédent depuis son confinement en Île-de-France.
Ultime fait d'arme de la saison 2020 de Christine Majerus: une deuxième place au Samyn des dames le 3 mars à Dour. © PHOTO: Serge Waldbillig
Après un début de saison encourageant sur les routes du Nieuwsblad et une très belle deuxième place au Samyn, la pandémie de covid-19 a complètement mis à l'arrêt la championne Christine Majerus et son vélo. Rageant.
Comment vivez-vous ce confinement?
Christine Majerus: «Je suis en France, et ici les autorités françaises conseillent de limiter ses déplacements. Aller s'entraîner dehors est interdit. Je m'adapte donc même si ce n'est pas agréable. Je m'entraîne sur les rouleaux mais cela crée une certaine monotonie. Et puis, on ne peut pas reproduire les mêmes efforts que sur la route. Au niveau de l'intensité, ce n'est pas pareil. Il faut trouver un juste milieu.
Le message de la championne est clair.
Christine Majerus: «Je suis en France, et ici les autorités françaises conseillent de limiter ses déplacements. Aller s'entraîner dehors est interdit. Je m'adapte donc même si ce n'est pas agréable. Je m'entraîne sur les rouleaux mais cela crée une certaine monotonie. Et puis, on ne peut pas reproduire les mêmes efforts que sur la route. Au niveau de l'intensité, ce n'est pas pareil. Il faut trouver un juste milieu.
Personnellement, je fais chaque matin une séance sur le vélo mais il faut veiller à ne pas perdre trop de sels minéraux quand on est sur les rouleaux. L'après-midi est consacré à des exercices de gainage ou de musculation.
En fait, ces séances servent surtout à conserver un rythme. Vu le contexte, c'est impossible de planifier un plan d'entraînement puisque nous n'avons aucune idée sur la date de la reprise de la compétition.
Vous avez été une des premières à dire ouvertement que vous ne souhaitiez pas vous rendre en Italie pour disputer une course, le 7 mars. Etait-ce prémonitoire?
«Absolument pas. Personne d'ailleurs ne pensait que la situation allait se dégrader à ce point. Je n'avais rien contre les organisateurs italiens, ni contre ce pays. J'aurais agi de la sorte quel que soit le pays, je ne comprends d'ailleurs pas pourquoi Paris-Nice s'est déroulé pratiquement jusqu'à son terme en pleine épidémie. Il faut se remettre dans le contexte: il y avait pas mal d'annulations d'événements, certains gouvernements conseillaient à leurs ressortissants d'éviter certaines zones.
J'ai aussi regretté le manque de réactivité de l'Union cycliste internationale (UCI). Souvent les sportifs sont les derniers à être informés d'une situation. J'étais aussi plus sensible à ce problème que mes équipières néerlandaises, il y avait un décalage entre elles et moi (les Pays-Bas ont misé sur une politique d'immunité de groupe qui s'est soldée par un échec). J'aurais aimé qu'il y ait un peu plus de bon sens à tous les niveaux.
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Un petit mot sur le report de douze mois des Jeux de Tokyo?
«Pour certains sportifs, Tokyo représentait un but, une chance unique de vivre un tel événement. Mais vu la situation, il faut penser aux autres. Maintenir ces compétitions n'aurait eu aucun sens. Tous les athlètes n'étaient pas sur un même pied d'égalité en termes de préparation. Je suis satisfaite de cette décision, la santé des athlètes a été respectée. Les conséquences de cette décision sont plus positives que négatives.
Cette crise sanitaire aura-t-elle un impact sur votre sport?
«J'espère qu'à l'avenir, on tiendra plus compte des recommandations des représentants du monde médical. A la crise sanitaire va succéder une crise économique et souvent dans des situations pareilles, le sponsoring est toujours le premier secteur sur lequel les sociétés font des économies. Le monde du sport, que certains considèrent comme la cinquième roue du carrosse, risque donc de subir un sérieux contrecoup. Mais j'essaye de ne pas trop y penser.
Et au niveau de la société, y aura-t-il un avant et un après covid-19?
«Tout va dépendre comment nous allons sortir de la crise. J'ai des doutes sur le fait que l'être humain retienne les leçons de cette crise. Le comportement de certains pendant le confinement en France me fait réfléchir. Les règles étaient pourtant claires et évidentes mais une minorité a continué à vivre sans en tenir compte. C'est regrettable. J'ose espérer qu'il y aura tout de même des changements.
Prenons l'exemple de l'Europe, au début de la crise, chaque pays a pris des initiatives dans son coin, il n'y avait aucune concertation. La situation a évolué favorablement depuis. Quand certains patients de l'Est de la France sont envoyés au Luxembourg, en Allemagne voire en Suisse, cela prouve que les mentalités changent. Ce type de démarche renforce l'unité de l'Europe. La question de la mondialisation va également revenir sur le tapis. Notre société a connu ce type d'événement par le passé mais cela restait au sein des communautés, les voyages à travers le monde étaient plus que réduits. On peut aussi se poser la question sur l'indépendance des Etats. Cette crise doit nous aider à revoir notre mode de fonctionnement dans certains domaines.»